Freyja

La Fin de la Lutte?


Une course haletante au milieu des hautes herbes, une silhouette encapuchonnée jaillissant de temps à autres avec une rapidité telle qu'elle ne semblait être qu'une ombre, la pleine Lune inondant les plaines d'une lumière argentée. Le vent caressait les plantes qui pliaient docilement à son passage, les champs ne devenant plus que d'immenses océans de verdures.
La silhouette continuait de courir, de fuir. Elle trébucha, mais se reprit aussitôt, continuant sa course folle sans se retourner. Un paysan bien matinal aurait pu constater que rien n'était lancé à ses trousses, et pourtant...

"Tu me fuis petite guerrière?"
La voix glacée raisonnait dans sa tête, encore et toujours. La jeune fille trébucha et tomba au sol, reprenant son souffle, son capuchon se retirant laissant voir une cascade de cheveux sombres dont les éclats blancs occupant les pointes témoignaient de sa couleur d'origine.

"Que t'arrive-t-il donc chère amante? Es-tu donc si effrayée pour ne pas me répondre?
-Tais-toi... La tête enfouit dans ses bras, elle ne bougeait pas, se contentant de réponde.
-Allons... Ne me dis pas que toutes ces guerres en perspectives, ce sang près à couler ne te séduit pas?le ton était amusé, narquois, moqueurAprès tout... Nous ne faisons qu'un, n'est-ce-pas ma chère?"


La jeune fille ne répondit pas, relevant son visage, un rayon de Lune frappant celui-ci. Il s'agissait d'une sombre. Ses traits exprimaient une grande douceur, ses lèvres semblaient soyeuses, mais le plus extraordinaire dans son apparence étaient ses yeux. L'un d'eux était d'un noir tendre, tandis que l'autre était entièrement gris, de sorte que l'on ne pouvait distinguer ni sa pupille, ni son iris. C'était comme si il était recouvert d'une fine pellicule de peinture grise, lui donnant à la fois un aspect fascinant et inquiétant.

"C'est justement pour ça que je dois en finir... Les Crysos, Liran, mon futur... Il est hors de question de les mettre en danger à cause d'un parasite...
-Comme c'est charmant... Je pensais que tu considérais les miens comme des frères et soeurs éloignés. Ce sont tes pensées, petite guerrière, ne l'oublie pas.
-En effet, j'ai appris à mieux les connaître. Ils sont les enfants de Père et de Mère également, donc... Tant qu'ils ne nous créer pas de problèmes, cela me va. Bien sûr, on ne peut pas dire que tu sois dans ce cas-là, par conséquent...Elle eut un petit sourire mauvais à cette pensée.Rien ne m'empêche de me débarrasser de toi...
Elle entendit un éclat de rire glacé.
"Te débarrasser de moi? Allons ma douce... Tu sais pertinemment que tu as besoin de moi que ce soit au combat, ou dans ta vie de tous les jours. Je suis une partie de toi ma chère, tu m'appartiens, et ce, dés qu'enfant, tu avais tué l'assassin de ton père, que tu le veuilles ou non.
-C'est ce qu'on verra...marmonna-t-elle entre ses dents.

Elle se releva et se remit à courir, partir à la recherche de cet individu qui pourrait l'aider, ses pas se dirigeant au gré des rumeurs des villages où elle s'arrêtait à la recherche des informations nécessaires. Cette lutte... Elle devait y mettre un terme, maintenant, peu importe les risques, elle devait le faire pour elle, pour...
"Liran... Attends-moi encore un peu... Je serai bientôt de retour..."

Son coeur se serra à la pensée de celui qu'elle aimait tandis qu'elle s'enfonça au coeur de la nuit. Elle n'était plus seule, elle n'avait plus besoin d'Ezekiel. Les souffrances qu'il a causé devaient disparaître. C'est ainsi que Freyja irait en finir avec cette bataille.

Un Retour Prématuré


Un corbeau se posa sur l'épaule de Freyja. Le capuchon relevé, un masque cachant ses yeux, elle détacha le parchemin de la patte de l'animal. Elle hésita un instant avant de le lire. Son ombre s'était matérialisé près d'elle, faisant semblant de la conduire, la faisant ainsi passer pour une aveugle.
Les rumeurs étaient mauvaises à son sujet, elle devait être davantage prudente.
Elle hésita un instant, s'apprêtant à lire la lettre, mais renonça. Inutile de se faire repérer, autant jouer le rôle de l'aveugle et agir comme telle.
Son ombre la mena à la sortie du village, dans un coin dissimulé. Elle s'assit au pied d'un vieux chêne et envoya son ombre chercher la jeune pâle qu'elle avait croisé à la taverne. Celle-ci s'exécuta.
Quelques minutes plus tard, elle revint avec la jeune fille.


"Un problème, Dame? demanda-t-elle.
-Et bien... Je viens de recevoir cette lettre, mais en mon état actuel, je suis incapable de la lire, je crains... dit-elle avec un petit sourire gêné.
-Je peux la lire pour vous si vous le souhaitez!
-C'est très aimable à vous, merci.

La pâle prit le parchemin, se mettant à lire à haute voix. On pouvait sentir la curiosité l'envahir à l'idée de quelle genre de lettre cette sombre pourrait recevoir. Une fois la lecture terminée, la jeune fille fronça les sourcils tandis que Freyja soupira.

"Décidemment, il décide de nous convoquer aux pires moments...
-Qui ça, Dame? Ce Satalis?
Freyja ne répondit pas.
-Pourquoi vous devez finir vos missions en si peu de temps? Il va vous tuer si vous ne le faîtes pas?

La sombre se releva, son ombre la soutenant:
-Merci pour votre aide. dit-elle, s'apprêtant à partir, mais l'elfe ne cessa guère.

-De quels types de rituels s'agit-il? A la gloire d'une divinité? Et les missions? En quoi cela consiste?

Freyja se retourna vers elle, agacée, la regardant de haut en bas. La pâle semblait être assez jeune. Une vingtaine d'années en âge humain. Elle continua de déverser son flot de questions, n'attendant aucune réponse il semblerait, lorsque la sombre l'interrompit d'un signe de main:

-Quel est ton nom, jeune fille?
-Moi? Edhine! Et v...?

Elle ne put continuer sa phrase que Freyja sortit une dague, égorgeant la jeune fille avec rapidité, la mine sombre. Le corps tomba à terre, une cascade de sang s'échappant de la plaie béante. Elle sortit une fiole de son sac, recueillant le fluide vital, gravant par la suite dans le verre le nom de la pâle.

"Je me disais bien qu'elle était du genre à mourir jeune." La voix d'Ezekiel retentit en elle, sans qu'elle n'y prêta d'attention.
Voilà une bonne chose de faite. Il n'y a plus qu'à retourner au manoir... Mais déjà, couvrons nos arrières...

Elle déchira sa cape et planta la dague dans son flanc et son épaule, prenant bien soin de ne toucher aucun point vital, envoyant son ombre cacher l'arme et chercher de l'aide. Plusieurs personnes vinrent, alertées de l'état de Freyja et de la pâle. Par chance, un guérisseur se trouvait parmi eux, prodiguant les soins nécessaires à la sombre.
Le lendemain, des funérailles furent organisées pour la jeune Edhine, la garde fût renforcée suite à l'agression des deux jeunes femmes par des coupes-gorges si l'on se base sur la version masquée des faits, et la jeune aveugle repartit, ses pas se dirigeant vers Aden.

Le Rituel

Je suis finalement de retour à Aden... Les gardes patrouillent sans cesse, au point que je suis à présent obligée de me faire passer pour une aveugle, même auprès des miens... De nouvelles recrues nous ont rejoints, une orc, une sombre et un humain... Cela fait du bien de voir nos rangs s'agrandirent. Mais je n'entends toujours pas Liran... Léo m'a dit qu'il a disparu... Je vous en prie, faîtes qu'il revienne..!!

Nous voilà tous réunis en notre lieu de culte. Satalis s'apprête à nous faire passer le rituel du Sang. Ils ont donc réussi à retrouver le Sang et l'Encre de Père sans moi. C'est une bonne chose de faite... Au moins, nous allons pouvoir servir Kain légitimement... Le rituel allait commencer lorsqu'un un grand bruit de roulade s'était fait entendre avant de s'arrêter. C'était Liran à tous les coups, ses entrées sont si reconnaissables. Pourtant, il m'ignora ou je ne sais quoi... Ses pas se sont dirigés vers quelqu'un d'autre. Cela a suffit pour qu'Eze prenne mon corps d'assaut. En plein rituel, quelle plaie... Pas maintenant, par pitié... Je refuse de les blesser!!

J'ai finalement reprit le contrôle de moi-même et à me calmer... Liran est venu près de moi, mais il semble... Absent... J'aimerai tant lui dire que je l'aime, mais... Est-ce le bon moment après toute cette absence..? Son contact m'apaise... J'aimerai tellement pouvoir m'endormir à nouveau dans ses bras, dans notre refuge... Entendre sa voix, si douce et si tendre... Voir son sourire sur son visage et ses yeux reprendre leur éclat à la fois joueur et attendri... Mon coeur... Tu ne m'as jamais autant manqué qu'à cet instant..!!

Voici l'heure de vérité... Chacun passe le rituel... Je préviens Satalis de me tenir isolée de tout le groupe une fois inconsciente... Il ne faut pas qu'Ezekiel agisse comme dans ces auberges pendant mon sommeil. Je ne laisserai pas commettre d'autres meurtres contre ma volonté!!
Le Sang de Père infiltre la plaie que Satalis m'a infligé, s'insinuant dans chacune de mes veines. La douleur est atroce, mon organisme me brûle tout comme les marques que le Sang fait apparaître sur mon corps. Il fait chaud... Beaucoup trop chaud... La tête me tourne, ma vision se brouille, je tombe, puis plus rien...

Il me semble reprendre conscience, mais est-ce vraiment moi..? Je ne parviens pas à ouvrir les yeux, mais mon corps avance tout seul... Que se passe-t-il..?

"Il semblerait que ton cher amant t'attende, petite guerrière.." Il me parla, cruel, machiavélique, sournois.
Arrête! Je t'interdis de le toucher!! J'utilise toutes mes forces, tentant de reprendre le contrôle de mon corps, l'obligeant à marcher droit devant sans s'arrêter devant Liran, comprenant qu'il s'agissait de lui. Si il s'approche de moi maintenant... Si il reste trop longtemps en ma présence... Je ne pourrais plus jamais le revoir..!!

Je ne vois rien, mais je perçois nettement l'aura de Liran. Modifiée... Plus sombre il me semble, mais toujours aussi douce... Je perçoit une odeur de sang également, ainsi que des restes d'aura... Celle de Krys... Il est mort il semblerait...
Mon corps s'arrête. L'aura d'Ezekiel se manifestant, prenant la forme de neuf queues de renard, dansantes comme une seule et unique flamme. Je sens l'aura de Liran s'approcher. J'oblige Eze à avancer, mais mon corps s'arrête à nouveau...

Freyja..? La voix de Liran parvînt à mes oreilles...
Ne t'approche pas plus, je t'en prie!! Ne fais pas de moi ton assassin par pitié!!
Il posa sa main sur mon épaule.

"Dis adieu à ton bien aimé, ma chère."
L'une des queues fondit sur Liran, commençant à prendre une forme tranchante, j'employai toutes mes forces pour redonner à la queue son aspect initial, frappant ainsi Liran, le repoussant sur plusieurs mètres. Profitant de cette reprise de contrôle, je récupérai mes affaires, les autres queues m'enveloppant pour me faire disparaître loin... Très loin...
Pardonne-moi mon amour... Je reviendrai une fois que j'aurais retrouvé mon état normal...

Sur la rive d'un lac, le corps de Freyja reposait. Maculé du sang d'une naine rencontrée à son point de destination, elle avait erré, massacrant quelques monstres sur son passage. Elle ouvrit les yeux, fixant son reflet dans l'eau, ne se reconnaissant pas. Il y avait certes la même douceur dans ses traits et son expression, mais ces yeux..? Celui qui était habituellement d'un noir tendre avait prit le doux éclat de l'or, ayant toutefois acquis un reflet ambré qui ajoutait plus de luminosité à son visage, l'autre restant pareil à la présence d'Ezekiel. Sa peau était plus sombre, se rapprochant de la teinte des nuages orageux. Ses lèvres étaient d'autant plus soyeuse qu'elles avaient pris une couleur plus sombre. Quant à ses cheveux... La teinte sombre tirait à présent sur une couleur rouge-violine, mais conservait ses pointes nacrées. Elle retira la robe de bure rouge utilisée pour le culte, révélant ainsi son corps nu à la clarté de la Lune. Des marques rougeâtres, pareilles à des tatouages enlaçaient sa taille comme une ceinture et remontait le long de ses hanches en un tracé délicat, pareil à la cicatrice de son enfance. Elle était à présent une kainiste à part entière, une fidèle de Père.

Retrouvailles


Comme toujours, l'eau tombait dans un bruit assourdissant. Les roches conservaient cet éclat scintillant, les lichens retenant les infimes gouttelettes comme si de minuscules diamants étaient incrustés de part et d'autre de la paroi. Le sang des combattants morts contre Ezekiel était toujours présent, témoignant du massacre qui s'était déroulé il y a maintenant des années...
Freyja s'avança doucement vers l'entrée du refuge, une étrange appréhension la saisissant. Elle voulait le voir, elle voulait l'entendre. Mais... Comment après tout ce temps..?
Elle commençait à s'enfoncer dans les méandres de la grotte lorsqu'elle s'arrêta. Quelqu'un chantait. Elle se retourna, apercevant une silhouette encapuchonnée, assise sur le bord de la falaise. Son coeur se serra légèrement, devinant de qui il s'agissait, puis décida de s'approcher, refermant les yeux afin de continuer de se faire passer comme étant aveugle. L'homme se leva, ne semblant pas remarquer sa présence et se dirigea vers la paroi de la montagne.

"Je ne mourrai pas... Je t'attendrai..."

Freyja se mordit la lèvre inférieure, ne sachant que faire. C'est alors qu'il se retourna rapidement, plaçant une dague sous sa gorge. N'ayant pu voir son mouvement, elle sursauta au contact de la lame froide contre sa peau.

"Liran..?"

Un silence se fit entendre. Elle sentit doucement la lame se retirer, mais sa main restait toujours sur son épaule. Un souffle chaud effleura doucement ses lèvres, suivit ensuite par ce doux contact qui lui avait tant manqué. Elle décela tout de même une odeur qui ne lui était pas habituelle... Un parfum à la fois âcre et entêtant qui lui faisait penser aux vastes terres orcs... Il s'écarta doucement d'elle, tout en lui retirant lentement son masque. Elle n'esquissa pas un geste pour l'en empêcher, bien qu'elle garda les yeux clos.
Ils échangèrent quelques mots, l'émotion se faisant toujours sentir. Elle se blottit contre lui, la conversation déviant peu à peu sur Ezekiel et sur le fait qu'elle fermait constamment les yeux. Elle du lui avouer... Qu'elle devait se débarrasser d'Eze, qu'elle allait devoir bientôt repartir, lui révélant à présent ses yeux. C'est alors qu'il lui demanda pardon pour tout à l'heure, disant qu'il y avait deux causes pour lesquelles il l'avait attaqué. La première, il ne voulut rien dire, la deuxième, c'était l'aura d'Ezekiel.

"Quelle est la première..?" insista-t-elle, sachant que la réponse lui ferait mal.

Il ne répondit pas, persistant dans son refus, semblant cacher quelque chose... Comme elle le craignait...
Elle sentit la rage monter peu à peu en elle.

"Hmm... Ton amant aurait-il trouvé une autre femme, te trouvant à présent inutile chère guerrière? Serait-il finalement le même que Satalis?
-Tais-toi...
-Quel dommage... Comme quoi le considères-tu déjà? Ah oui! Ton cher époux..." Ezekiel parla, implacable, cruel...

"Bien... Dans ce cas tu me le diras une fois que je serai exorcisée..!" "Si je serai encore capable de parler, ou si je ne sombrerai pas dans la folie..." pensa-t-elle en serrant les poings, pénétrant dans la grotte.

-Frey!! Il coura derrière elle, s'arrêtant à quelques mètres.
-Quoi? Elle s'arrêta mais ne se retourna pas, le ton froid.
-Voilà pourquoi..."

Il tenait quelque chose dans sa main. Il le lança vers Freyja, celle-ci rattrapant l'objet au vol et l'examina. Il s'agissait d'un sachet contenant des herbes. A première vue, elle aura dit qu'il s'agissait d'herbes médicinales, c'est alors qu'elle sentit cette étrange odeur. Entêtante, âcre, comme les terres brulées des territoires orcs. Elle imagina de fines colonnes de fumée au parfum semblable mais plus doux, moins puissant, se souvenant de ses après-midi en compagnie de Kajira. Puis elle fit le lien. Ce sachet... Cette odeur... Liran... Elle leva les yeux vers lui, sentant quelque chose se briser en elle.

"CRETIN!! Elle lui cracha ce mot à la figure, la fureur l'envahissant peu à peu.
-Frey..."

Elle n'en pouvait plus. Tous ces mois d'absence, l'espoir qu'il lui écrive, le parchemin qu'elle lui avait envoyé, le désir de le retrouver, de se blottir contre lui, sa lutte à présent constante avec Eze, et maintenant ça. C'en était de trop.

"-Grâce à ça, Satalis était fier de moi, tu sais..?"

Elle n'y tient plus. Son ombre se jeta aussitôt sur Liran, se plantant dans la roche à un mètre de lui. Satalis... Elle l'imaginait bien en train d'encourager Liran à se détruire... Oh, comme elle avait envie de se jeter sur lui, de le détruire... Seulement était-ce son envie ou celle d'Ezekiel..?
Liran s'était protégé la tête de ses bras. Pendant un bref instant, elle sentit une déchirure en elle, cette vision la ramenant à la réalité. Mais sa colère n'était toujours pas tomber.

"-Je voulais te voir, c'est tout... Avec ça, j'imaginais un monde où tu étais avec moi... J'oubliais la réalité...

Nouvelle douleur. Mais elle faisait partit de la réalité... Tenait-il tant que ça à l'oublier également..?

-TU CROIS VRAIMENT QUE C'EST CA QUI VA TE PERMETTRE DE ME VOIR?!!

Silence.

-CONTINUE DE FUIR LA REALITE, CONTINUE DE TE DETRUIRE SI TU VEUX, MAIS CA SERA SANS MOI, TU M'ENTENDS?!? Des larmes roulaient le long de ses joues, l'éclat de son oeil droit devenant plus doré.
-Non Frey... Pas sans toi..!!"

Ca y est, il souffrait... Elle pouvait voir ses larmes couler le long de son visage tandis qu'il lui prit les mains, enfouissant son visage entre elles, tombant à genoux...A nouveau, son coeur se déchira à sa vue... Pourquoi avait-il fait ça..?

-Je ne veux pas te voir te détruire par ça et rester impuissante face à ça, tu m'entends..?! Sa gorge se serrait, mais elle avait retrouvé un peu de son calme.
-Ca ne me détruira pas...
-Oh que si, ça le fera!! Ca te détruiras, et ce, sans que tu ne t'en rendes comptes!!"

Sa voix redevenait agressive, mais on pouvait y décerner autre chose... De la déception, de la souffrance, de la haine... La haine d'elle-même pour être la cause de cela, et la haine pour lui pour laisser la souffrance prendre possession de lui... Pour agir de la sorte alors qu'elle lui avait dit qu'elle reviendrait... Elle se blotissa aussitôt dans ses bras, voulant retrouver ce refuge qui était le sien... Plus petit que celui d'Ezekiel, mais infiniment plus sûr et plus doux...

Les mots ne devinrent alors plus que des chuchotements, dérivant peu à peu vers des sujets plus personnels, comme la promesse qu'il lui avait faite...

La Fin...


J'y suis enfin arrivée... Des mois que je parcours le monde en espérant le trouver... Ma liberté sera totale à présent... Je ne souhaite plus devenir SA nourriture, SON jouet, SON hôte. Il est temps d'en finir...

Freyja regarda les lumières scintillant à l'intérieure de la bâtisse. Le vent glacé du Nord agitait violemment les pans de sa cape parsemée de flocons de neige. Le froid traversait ses habits, mordant sauvagement sa chair, un épais brouillard s'était levé au point qu'elle du parcourir la montagne sous forme de renarde avant de parvenir jusqu'ici. Elle resta immobile un instant, décidant finalement d'avancer. Cela ne servait à rien de rester dehors...
Elle frappa à la porte d'un geste assuré, et attendit.
Ce fût un vieux nain qui lui ouvrit, posant son regard sur l'étrangère, l'observant de bas en haut.

"Vous désirez..? dit-il poliment, avec toutefois une pointe de méfiance dans la voix.
-De l'aide, si vous acceptez de me l'offrir.
-Que voulez-vous?
-Me débarrasser de quelque chose, si vous voyez ce que je veux dire..."

Il sembla que l'homme la jaugeait du regard, restant silencieux.

"Entrez... maugréa-t-il en s'écartant pour laisser passer la sombre.
-Merci beaucoup..."

Freyja rabaissa son capuchon, laissant retomber sa douce chevelure dans son dos. Son masque, cachant encore et toujours ses yeux. L'homme lui fit signe d'accrocher sa cape près de l'entrée et de venir s'assoir à la table, ce que Freyja fit.
Au passage, son regard parcouru la pièce. Il s'agissait d'un salon modeste, mais confortable, duquel se dégageait une ambiance chaleureuse malgré le blizzard qui soufflait au dehors. Un immense brasier ronflait dans la cheminée dégageant une agréable chaleur qui redonnait vie à ses membres engourdis. L'endroit n'était nullement ce à quoi elle s'attendait de la demeure d'un homme de cette réputation. La surprise lui était agréable. L'homme était simple, humble et ne semblait avoir aucun orgueil de ses talents à première vue. Elle éprouva aussitôt de la sympathie pour le nain. Celui-ci était affairé aux fourneaux et revint en déposant un bol de soupe devant elle.

"Buvez-ça, cela vous fera du bien, dit-il, s'asseyant face à elle.
-Merci..", elle eut un très léger sourire, buvant alors une petite gorgée.

La chaleur se répandit dans tout son corps, réanimant chacune de ces parcelles à la manière où les fleurs éclosent au printemps après avoir été plongées dans un profond sommeil hivernal.

"Je suppose que vous avez une de ces sales bestioles en vous, si vous êtes venue me retrouver, dit-il en buvant le potage également.
-En effet...
-Il est bien rare de voir les sombres demander de l'aide à des "sous-races" comme vous les appelez.
-L'être inférieure est celui qui perd son temps à se bercer d'illusion et à se satisfaire de ses chaînes. Annoncer que sa propre race est supérieure à toutes les autres, c'est flatter son égo, rien de plus.
-Je vois... Cela faisait longtemps que je n'avais pas vu de kainiste."

Freyja eut un petit sourire.

"Il est vrai que notre culte a disparu depuis longtemps, même si il est en train de renaître. Cela m'étonne toutefois que vous en connaissiez les moeurs exacts..
-Disons que j'ai pu vivre assez longtemps pour arrêté de prêter attention aux dires de chacun, répondit-il en reposant son bol. Enfin. Votre démon provient des ténèbres si je ne m'abuse, non?"

La sombre acquiessa, retirant son masque, dévoilant ainsi ses yeux.

"Hmm... Je vois... Il a déjà pris le contrôle de votre corps?
-Trois fois dans toute ma vie, oui. Lorsque je suis en position de faiblesse sentimentalement.
-Lié aux émotions alors... Vos amis ont-ils constaté des changement en vous?"

Freyja réfléchit un instant, pensant aux paroles de Jisune.

"Il semblerait que je sois plus dure, moins sensible. Mais je pense qu'il s'agit de ma vie personnelle qui m'a endurci. En revanche, il y a eu une période où j'étais vraiment différente, mais c'était il y a longtemps. Sinon, son contrôle se manifeste surtout par la manipulation de mon ombre."

Le nain hocha la tête.

"Bien. Si vous voulez bien retirer le haut de votre armure, je vais procédé à la mise en place d'un sceau. Si tout se passe bien, son âme sera scellé, ce qui nous facilitera la tâche. Nous procéderons ensuite à l'exorcisme."

Freyja acquiessa et s'exécuta, révélant les diverses marques dues au Jugement de Gran Kain ainsi que la marque d'Ezekiel se trouvant sur son sein gauche et la cicatrice de son enfance, souvenir d'une césarienne dans un jeune âge. Elle s'agenouilla afin de permettre au nain de mettre en place le sceau. Le nain, nullement troublé, s'entailla l'index, traçant des symboles complexes autour de la marque, puis l'apposa dessus brusquement. Son corps fût pris d'un violent spasme, une douleur fulgurante parcourant la moindre de ses veines. Elle émit un cri silencieux, sentant chacun de ses muscles se contracter douloureusement, de violents tremblements la saisissant. La douleur était plus forte que lorsqu'Amélia avait scellé Ezekiel pour la première fois. Le nain recula, attendant. Il sembla que son sang était à présent inscrit dans la chair de Freyja, les symboles étant à présent gravés en elle. Elle resta un instant allongée, recroquevillée sur elle-même en attendant que la douleur cesse. Ce ne fût qu'après de longues minutes qu'elle se redressa enfin, tremblante.

"Vous souhaitez toujours l'exorciser? La voix du nain était solennelle.
-Oui...
-Vous savez que vous risquez la mort et autre?
-Je le sais.., dit-elle, la respiration saccadée, Mais si je ne le fais pas, mes proches souffriront..."

Le vieillard acquiessa.

"Bien... Tenez-vous prête dans ce cas... La douleur sera encore plus atroce..."

C'est alors qu'il fît plusieurs tracés autour de la sombre, dessinant des cercles, des pentacles et toutes autres formes géométriques, écrivant des incantations tout le long des lignes. Des bougies étaient allumées et disposées en hexagone. C'est alors que l'homme se releva et commença à incanter d'une voix sourde, grave. L'effet ne se fit pas attendre. Le corps de la sombre se tordit dans tous les sens. C'était comme si elle se désagrégeait lentement, comme si on arrachait chaque organe, chaque lambeau de chair mais dans des proportions multiples. C'est alors qu'elle le sentit. Quelque chose sortit de son corps, son âme se déchirait. Elle cru entendre un cri, puis plus rien. Son corps reposait sur le sol, inanimé...

Un Monde...


Le silence, le froid...
Le silence, le froid, les ombres...
Le silence, le froid, les ombres... Et la mort... Rien d'autre...

J'ouvre les yeux. Le monde est terne, gris, vide... Quelques ombres rodent autour de moi sans que je ne puisse les distinguer réellement... Où suis-je...? Il me semble être dans une ville... Je reconnais les remparts caractéristiques... Des formes hautes, imposantes, mais si sombres... Ca ne peut être la Cité... Peut-être s'agit-il de Giran ou d'Oren... Seulement... Que se passe-t-il...? Pourquoi est-ce-que je ne parviens pas à bouger..? Pourquoi est-ce-que je n'arrive pas à prononcer le moindre mot..? Et mon corps...? Pourquoi est-ce-que je ne ressens plus rien..? Que m'arrive-t-il?

Une ombre s'approche. C'est alors que je remarque qu'une mélodie s'échappait de mes lèvres. Mais... S'agit-il vraiment des miennes..? Je crois reconnaître la voix de Léo... Son aura reste reconnaissable... Surement une conséquence du Jugement de Père...Pourtant... Je ne parviens pas à saisir ses mots... Ni à arrêter la mélodie, d'ailleurs... L'ombre me saisit doucement le bras et me relève... J'étais donc assise..? Une autre vient nous rejoindre... Je ne connais pas cette présence... Je sens la peur me gagner. Que se passe-t-il?!? J'aimerai fuir ce monde, mais mes jambes refusent de bouger. Mais en ai-je réellement? Ai-je encore seulement un corps?!?
Une autre ombre s'approche alors de nous, différente... Une aura... Toujours aussi douce malgré un certain assombrissement... Une présence qui suffit à me rassurer...

-Li...ran...

Les mots étaient finalement sortis, faibles, avec difficultés, audibles seulement pour les personnes à proximité...

-Re...fu...ge...

Des paroles incompréhensibles parvinrent à mes oreilles, mais je reconnus clairement la voix de mon aimé. Peut-être étais-je bien vivante finalement...
Quelqu'un tire doucement sur mon bras... Je sens mes jambes réagir, emboitant le pas de Liran et de Léo, me dirigeant vers la passeuse. Soudain, le paysage change. Les hauts murs deviennent des arbres, le sol dallé, d'immense plaines... Nous ne sommes pas loin du refuge... La marche commence. Je reconnais le bruit de chute d'eau caractéristique, la fraicheur et l'humidité de la caverne, mais je reste toujours coupée de ce monde... Pourquoi..?
On me fait s'assoir sur un lit... J'entends la rumeur de conversation entre les deux hommes, mais encore une fois je ne comprends rien... Je vois ensuite l'ombre s'éloigner en même temps que l'aura de Léo... Liran s'approche de moi... Je sens autre chose aussi... Rage... Tristesse... Haine... Amour...
Je suis tellement désolée Liran..!! J'aimerai tellement pouvoir te le dire, mais... Je n'y arrive pas...

-Eze... par...tit...

Un chuchottement me répond tandis que quelque chose de mouillé s'écrase sur ma joue... Une larme..? Je lève les yeux vers le visage de l'ombre qu'est devenu mon bien aimé... Je distingue nettement ses yeux, devenus rouges suite au Jugement... Ceux-ci me regardent avec... douceur il me semble... Je reconstitue son expression à partir de mes souvenirs, cherchant à revoir son visage...
C'est alors qu'il écarte doucement une de mes mèches de mon visage, d'un geste doux, rassurant, habituel, venant ensuite déposer un baiser sur mon front. Je revis le monde dans un éclair coloré. La flamme orangée d'une torche, les parois sombres de la chambre, une chevelure rousse, un visage plus doux et rassurant que jamais.

-J...t'aime...

Un sourire apparut sur son visage, tandis que ma vision se ternit à nouveau.

-Moi aussi Frey...

Un murmure me répondit, compréhensible cette fois. Puis, le monde redevint gris et vide, avec pour seule compagnie, l'ombre qu'était devenu mon mari...

Le Calvaire Continue...


Le temps passe... Lentement... J'ignore combien de temps cela dure... J'ignore combien de temps encore, je resterai prisonnière de mon propre corps, de ma propre condition... La présence de Liran me ramène parfois à la vie durant une très courte période de temps, le monde retrouve alors les formes et les couleurs de la vie, mais pour l'heure, je reste prisonnière de ce monde... Prisonnière de la mort... S'il vous plait, je ne veux plus rester enfermée ici... Je veux sortir!!!!

Le noir.

Je rouvre lentement les yeux. J'entends la rumeurs des conversations tout autour de moi. Le refuge à laissé place à la ville, toujours aussi grise et terne... Etrangement, le décor semble bouger, s'avancer vers moi... Ah non... C'est moi qui est en train de marcher... Le jour s'est levé... Mais il faisait nuit au refuge, non..? Alors, comment est-ce-que j'ai atterrit ici..?

-Freyja?

Mon corps s'arrête de lui-même tandis que je tourne la tête vers l'ombre. La voix était reconnaissable et compréhensible cette fois...

-Lé...o..?

-Oui, c'est bien moi. Frey, tu me reconnais?

Je ne répondit pas. Les mots étaient à nouveau incapables de sortir de mes lèvres... Je crus voir quelque chose s'agiter devant mes yeux... Sa main sans doute... Il resta un moment silencieux, puis prononça quelques mots que je n'arrivais pas à saisir... Une fois de plus...
Je le vis s'éloigner de quelques pas, s'arrêter et revenir finalement vers moi, me prenant doucement le bras, m'entraînant vers la passeuse...

-VIens...

Il annonça une destination. Encore une fois, je ne saisis qu'un marmonnement incohérent, mais lorsque j' entendis le bruit de la mer et d'une fontaine, il n'y eut plus aucun doute qu'il s'agissait de Heine. Léo m'emmena je ne sais où. Au bord de l'eau il me semble... Je pus distinguer le changement de texture que prenait le sol, l'océan n'étant plus que pour moi, une simple masse grisâtre aux éclats blancs de temps à autres.
Il me fit s'assoir, me parlant doucement. Pourquoi est-ce-que je ne comprends rien à ce qu'ils disent tous?! Combien de temps cela va-t-il encore durer?!
Mes pensées se bloquèrent soudainement alors que Léo me calina. Quelque chose montait en moi... Un appel..? Non... Quelque chose de beaucoup plus subtil... De plus... Sauvage... Brutal...
Je me levai. Léo me regarda, inquisiteur.

-Par... tir... chas... ser...

Je m'éloignai sur ces mots, mes pas me guidant vers les plaines sauvages, tandis que quelque chose grondait en moi... Quelque chose qui désirait cette couleur rouge, ce goût à la fois doux, âcre et voluptueux. Elle voulait voir... le sang couler, teinter ce monde décoloré... de sang.

Réunion et Déchéance


Un corbeau sur mon épaule... Une lettre... Une réunion... Les Crysos...
J'ai finalement pu déchiffré les entrelas de ligne, reconstituant ainsi le message de Satalis... Cela faisait longtemps...
Aujourd'hui, le monde est un peu plus coloré... Les formes restent floues, les couleurs semblent s'afficher à travers un écran de fumée grisâtre, mais il m'est déjà un peu plus familier... Quant aux mots... Ils m'échappent. Il me semble qu'il s'agit plus de pensées fugitives qui s'expriment à haute voix qu'autre chose... Seulement... Je reste toujours prisonnière de moi-même... Tout me semble lointain, presque étranger...
Mes pas me dirigent alors lentement vers le manoir. Ma main se lève mécaniquement pour ouvrir la porte... La rumeur des conversations me parvient... Ils sont tous là...

Je reste debout dans l'encadrement de la porte. J'entends la voix de Satalis qui m'invite à entrer. Mon corps ne bouge plus... Le décor se ternit un peu plus... Une silhouette encapuchonnée se joint alors à moi, me prenant doucement par le bras:

-Laissez-moi vous guider, dit-elle.

Sa voix était agréable... Douce... Féminine... Et cristalline... Je me laissa faire, docile, m'asseyant alors à ses côtés.
Je ne saisis pas les paroles de Satalis par la suite... Il me semble qu'il parlait de grade... Encore des modifications..? Décidément... Il semblerait que j'ai perdu mon statut de Guy'ya... Peu importe... Le pouvoir ne m'intéresse pas... Mes ambitions changent... Ne me mets pas en colère en tout cas Satalis... Ne t'interpose pas entre moi et mes desseins... Sinon, le sang coulera, et ce ne sera pas forcément le mien.
Je fis taire cette pensée... Ca recommence... Le sang, les griffes, les crocs... Et les cornes d'une bête sauvage, assoiffée de sang... L'image fugitive d'une bête tapit dans l'ombre à l'attente de sa proie, sa gueule dégoulinante de ce fluide pourpre... Qu'est-ce-que cela signifie-t-il..?

Une présence se fît sentir derrière moi... Khaneyl... Je ne tournai pas le regard vers elle, fixant toujours l'autre bout de la table devant moi. Seuls quelques mots sortirent de mes lèvres de temps à autres... C'est alors que Satalis parla d'une bande de pâles... Des pâles qui s'en étaient pris à Liran... Ma vision changea immédiatement, se colorant subitement. Je vis le visage du sombre distinctement, tout comme la salle de réunion et ses grands fauteuils confortables, seulement... On aurait dit que tout était légèrement teinté de rouge...

-Il faudra s'en occuper, entendis-je.
-Je... m'en... charge... Détruire... Tuer...

Tels étaient mes mots, mes pensées... Massacre... Destruction... Sang... Vengeance... Il faut que je me calme... Si jamais je ne me contrôle pas...
C'est alors qu'une odeur me parvînt... Métallique, chaude, douceâtre... L'odeur du sang..! Elle émanait de Khaneyl... Mon corps se raidit un instant, puis je tournai la tête vers elle. Elle cachait une plaie à l'aide d'un mouchoir... Stop! Contrôle-toi Freyja, contrôle-toi !!!

Je me forçai à me lever subitement afin de sortir de la pièce. Je sentais que tous les regards étaient braqués sur moi, mais il fallait que je m'éloigne... Que je me reprenne...

-Sang... Tuer... Détruire...

Le silence demeura tandis que je tournais le dos à chacun.

-Je... reviens...

Mes pas me dirigèrent vers la salle de bain. Je plongeai aussitôt mon visage dans l'eau, le calme m'envahissant peu à peu alors. Il semblait que seul le contact de l'eau parvenait à m'apaiser lorsque j'étais prise par ces... accès meurtriers...
Je revînt après quelques instants... Les Crysos étaient prêts à partir... Une chasse allait être donnée...

Le Siège de Goddard


-Le siège... Va avoir lieu...

Je regarde longuement le château, du sommet d'une colline. Comme chacun des miens, mon visage est dissimulé, masqué. Comme si j'avais à présent besoin d'un masque pour dissimuler ce que je suis... Je ne suis rien...

Mon regard s'abaisse vers les cinq armées invoquées par le Pacte... La tension monte en chacun d'eux... La soif du combat se fait sentir... La soif de... Sang.
Je secoue légèrement la tête. Tout me paraît si... Indifférent à présent... Je ne vois pas mon bien-aimé... Liran... Fais attention à toi surtout... Tu es la dernière étincelle de vie qui me reste...
De l'autre côté, derrière les hautes remparts, on peut entendre les préparatifs des défenseurs... Le Lys... Ambre... Et tant d'autres...
Les membres du Pacte commencent à avancer, mon corps quant à lui reste immobile... Ma place est-elle réellement parmi eux..? Une défunte peut-elle combattre auprès de ceux qu'elle désirait protéger..? Mais suis-je réellement défunte? Cette étincelle de vie en moi n'est-elle pas plutôt quelque chose qui me rattache à un monde auquel je ne peux retourner?! Ce monde n'est-il pas plutôt le fruit des souvenirs invoqués par un esprit qui désire la vie si désespérement qu'il rejette l'état même dans lequel il se trouve ?!?

La révolte gronde à nouveau... Le sang va bientôt couler... Entretuez-vous... Déchirez-vous... Laissez vos entrailles nourrir les bêtes affamées... Entendez-vous leurs hurlements..? Les sentez-vous approcher furtivement dans votre dos..? De fiers guerriers vous ne deviendrez plus que des charognes... Laissez-les se repaître de votre sang... Laissez-moi me nourrir...

Je m'enfuis aussitôt. Il ne fallait pas, pas maintenant!! Les Crysos... Je sais que j'arriverai à me contrôler, mais les membres du Pacte... Si je m'en prends à un seul, la couverture de Satalis sera découverte.
Je dois fuir... Fuir au loin, encore et toujours plus loin, là où je ne ferai de mal à personne... Retrouver... mon... monde... Là où les morts se retrouvent...

Le monde redevient gris, les cris ne sont plus que des murmures, et c'est vers le cimetière que je m'enfuis...