Freyja

"La Lune... Belle, glacée, intouchable... Une sphère d'argent règnant sur les ténèbres de la nuit..."
Freyja soupira tout en contemplant ce qu'elle considérait comme être l'incarnation de sa mère, ainsi que de tous les autres membres de sa race: Shillen. Elle soupira à nouveau, puis fouilla dans sa sacoche et en sortit un sachet de velours noir, fermé par un ruban pourpre. Elle ouvrit celui-ci et en vida le contenu dans sa main. Un pendentif en argent, serti d'un onyx noir en tomba. Freyja referma alors sa main et regarda la Lune d'un regard mélancolique tout en murmurant
"Père... Mère..."
Elle fixa d'un regard vide la surface lisse du lac, troublée seulement par les quelques larmes s'échappant de ses yeux, tandis qu'elle se remémorait ce jour... Ce jour où sa vie ne devint plus que mensonge, le jour où un masque couvrit à jamais son visage...

Livre I: Deux soeurs

Cela se passa il y a environ trente ans, dans un village aux alentours de Giran. Ce village était peuplé exclusivement d'elfes, mais pas de ces elfes pâles qui avaient trahis leur mère et déesse suprême, non. Il était peuplé de ces elfes à la peau sombre et aux cheveux blancs, de ces elfes amoureux de Shillen et à la beauté singulière: les elfes sombres. Les parents éduquaient paisiblement leurs enfants selon le culte de la Déesse Mère, et les enfants écoutaient d'une oreille attentive. Leurs coeurs se remplissaient de haine pour ceux qui les avaient trahis en même temps qu'ils couraient, inondant le village de leurs rires innocents. Parmi eux, deux soeurs se démarquaient particulièrement. Elles ne partageaient pas totalement cette haine des humains et de ces "pâles". Sûrement parce que leur père, le maître d'arme du village leurs avait dit un jour "La vengeance n'engendre que la haine, et la haine n'engendre que la guerre. La guerre cause d'innombrables morts, et ces morts suscitent la soif de vengeance parmi les survivants. Il n'y a aucune issue en choisissant cette voie." Les deux fillettes avaient été si surprises par ces mots qu'elles crurent immédiatement à ses paroles. Après tout, c'était leur père, le maître d'arme du village qui les avait prononcées, il ne pouvait avoir que raison. Et qu'en pensait leur mère me demanderiez-vous? Elle n'avait pas tellement l'occasion de s'occuper de l'éducation de ses filles... Elle est morte quelques mois après la naissance des jumelles, nul n'en sait la raison. C'est pourquoi leur père accordait un soin particulier à ses deux filles, les entraînant au combat, l'une et l'autre.
Freyja avait tendance à se considérer comme l'aînée et son tempérament impulsif correspondait à merveille avec son style de combat : le combat à l'épée. Elle avait vu une de ces magnifiques jalil combattre avec deux épées, ses lames tourbillonnaient et elle se mouvait de sorte à réaliser une danse captivante. En elle, elle voyait toute la beauté et la grâce de Shillen. Elle espérait un jour, devenir l'une d'entre elles. Ainsi, elle fera la fierté de son père, et pourra protéger sa frêle soeur...
Mais Ondinee n'était pas aussi frêle que le croyait Freyja. Bien qu'elle avait une consistance physique plus faible que sa soeur, et qu'elle était incapable de manier une épée, au grand désespoir de sa soeur, elle possédait un tempérament plus calme et réfléchi. Ce fût un des mages du village, Nebilim qui, s'amusant de l'obstination de leur père à faire d'elles de fières combattantes, lui fit remarquer que l'enseignement de la magie conviendrait sûrement mieux à Ondinee. C'est ainsi qu'Ondinee entama son apprentissage de la magie noire.
Freyja sentit l'inquiétude monter en elle... La magie noire... Cela signifiait qu'Ondinee la surpassera, non? Elle devint aussitôt blême. Cela veut dire que sa soeur n'aura plus besoin d'elle pour la protéger? Et son rôle de grande soeur dans tout ça? Le lien unique qui les liait? Car elles étaient extrêmement proches toutes les deux. C'était Freyja qui soignait Ondinee lorsqu'elle tombait malade. C'était elle qui l'avait protégée lorsqu'un loup affamé s'était jeté sur sa jeune soeur. C'était elle aussi qui la poussait sans cesse à s'entraîner, à ne pas abandonner. Mais c'était Ondinee qui se faufilait dans le lit de sa soeur lorsque les hivers étaient trop rudes. C'était Ondinee aussi qui savait consoler sa soeur lorsqu'elle pleurait. Et c'était elle qui donnait à Freyja la force de se surpasser et qui la soignait dés qu'elle était blessée. Souvent, on voyait les deux soeurs tendrement enlacées: deux anges de Shillen. Elles étaient si différentes l'une de l'autre et pourtant si semblables au fond, telles étaient les deux soeurs à la chevelure d'argent et aux yeux d'onyx... Elles exploraient souvent les plaines aux alentours la nuit tombée, s'extasiant sans cesse sur la lumière froide et argentée que la Lune diffusait sur les vastes étendues vertes. Sans cesse, elles s'émerveillaient devant divers objets tels des pierres aux couleurs et aux formes singulières, des éclats d'armures témoignant de l'infortune de certains combattants, et autres objets aussi captivants les uns que les autres. Les deux fillettes regroupaient tout cela dans un coffre qu'elles s'amusaient à appeler leur "trésor".

C'était l'époque des rires innocents... Une vie paisible loin des massacres, loin des persécutions, hélas tout à une fin, et Shillen doit reprendre ce qui lui est dû: nos vies.

Livre II: Le bouleversement

Ce jour là, on pouvait sentir une forte tension dans le village. Les enfants ne couraient plus, ils étaient cloitrés chez eux. Les adultes couraient à leur place, fébriles, chacun ayant les armes à la main. Lorsque les fillettes demandèrent à leur père ce qu'il se passait, celui-ci se contenta de les amener dans la cour de la maison et de leurs dire que c'était l'heure de l'entraînement, la mine sombre. Freyja prit son épée tandis qu'Ondinee sortit son bâton.
"Donnez le meilleur de vous-même, je serai sérieux cette fois..."
Il avait prononcé ces paroles avec une voix si grave, que les fillettes en furent décontenancées. Elle se jetèrent un regard plein d'inquiétude avant de lancer l'assaut. Freyja fendit l'air de son épée, tentant de toucher son père, mais rien n'y fit: il esquivait ses attaques avec une incroyable facilité, tout en raillant sa fille sur sa faiblesse. Quant à Ondinee, c'était à peine si ses sorts faisaient effet. Ce ne fut que lorsque leur père contrattaqua et blessa superficiellement Freyja que le combat s'interrompit.
"Vous êtes trop faibles pour l'instant..., sa voix était devenue mélancolique, Freyja, tes mouvements sont beaucoup trop facile à prévoir. Tu as beau être douée au combat, tes attaques seront inutiles si ton adversaire les esquive sans cesse. Tu te laisses ensuite gagner par la rage, et tu t'épuises inutilement comme une incompétente."
Il avait prononcé ces paroles sur un ton si ferme que Freyja sentit la honte colorer ses joues.
"Quant à toi Ondinee, reprit-il, tu n'arrives pas à te concentrer. Nébilim m'avait pourtant assuré que tu te débrouillais très bien en matière de sorts, mais à ce que je vois ton talent est inutile sur un champs de bataille."
Freyja vit clairement que ces mots avaient frappé sa soeur. Il repartit alors à l'intérieur de la maison, laissant les deux fillettes. Elle se lancèrent à nouveau un regard inquiet et observèrent leur père à travers la fenêtre: il paraissait absorbé par l'écriture d'une lettre. Bien qu'il ne le paraissait pas, elles sentirent son inquiétude. Que se passait-il? Elle décidèrent d'attendre sur les marches, en silence. Freyja regarda l'état de sa blessure. La coupure avait cessé de saigner et n'avait pas l'air très profonde. Ondinee regarda la blessure et demanda :
"Ca fait mal..?"
Elle semblait inquiète. Sa soeur lui répondit alors en souriant :
"Sur le moment, oui un peu, mais là, je ne ressens plus que des picotements, donc ça va." L'enfant s'approcha alors de sa soeur aînée et sortit un chiffon imbibé d'eau et des bandages.

Elle entreprit alors de lui nettoyer doucement la blessure avant de lui faire un bandage tout en lui disant
"Si j'avais appris des sorts de soin, je les aurais utilisé immédiatement sur toi, mais je n'ai pas encore l'expérience nécessaire... Désolée..."
Freyja tenta de la rassurer du mieux qu'elle put, si bien qu'Ondinee sourit légèrement.
Une à deux heures plus tard, leur père revint, tenant deux longs paquets dans ses bras ainsi que deux sacoches de voyage. Il observa ses filles un instant, posa son fardeau au sol, puis les enlaça brièvement avant de leurs mettre les paquets dans leurs bras et de leur dire d'une voix ferme de partir et de ne plus jamais revenir. Les fillettes protestèrent, mais leur père les fit taire d'un geste de la main.
"Vous êtes trop faibles pour rester dans ce village plus longtemps!! Maintenant, partez avant que vous ne me déshonoriez davantage!! Je ne veux plus vous revoir ici, vous m'entendez?! ".
Les deux soeurs, bouleversées, s'enfuirent alors, leurs paquets dans les bras et les larmes aux yeux. Elles couraient, elles couraient, mille pensées se bousculant dans leur tête. Le temps ne comptait plus, ce ne fut que lorsqu'Ondinee trébucha et tomba au sol que Freyja s'arrêta et revint sur ses pas, tremblante.
"Pourquoi père a-t-il réagi comme ça..?"
C'était les mots qu'avaient prononcés sa jeune soeur...
-Je ne sais pas... , répondit-elle.
La culpabilité s'insinuait peu à peu en elle. Pourquoi était-elle si faible? Si elle avait été ne serait-ce qu'un peu plus forte, leur père ne les aurait pas rejeté ainsi! Elle l'avait déçu, elle n'était pas digne de son enseignement, voilà tout...
Des larmes s'écrasaient sur le paquet qu'elle tenait toujours. Elle entreprit alors de défaire l'emballage révélant une magnifique épée, un pendentif serti d'un onyx noir, et une lettre. Elle jeta alors un coup d'oeil à sa soeur, qui en la voyant, tachait d'en faire de même. Son paquet contenait également une lettre, mais aussi un bâton d'une rare qualité et une bague de jade. Elles commencèrent toutes deux à lire leurs lettres respectives, s'asseyant dos à dos, l'une contre l'autre.

"Freyja, ma chère fille,

Pardonne-moi pour mon comportement de tout à l'heure, mais je n'avais pas le choix... Il existe des choses en ce monde auxquelles ta soeur et toi ne pouvez encore être confrontées. Je ne peux t'en dire plus, il ne nous reste que très peu de temps... J'aurais tellement aimé rester avec vous, mais il semblerait que le destin en ait décidé autrement, c'est pourquoi tu dois désormais poursuivre seule ton apprentissage.
Ce pendentif était un cadeau quie j'avais offert à votre mère peu de temps après votre naissance. Ouvre-le si tu te sens seule et souviens-toi que quoiqu'il arrive, nous serons toujours à tes côtés.
N'abandonne jamais ton but. Ne te laisse pas désarmer par la mélancolie. Tu ne fais pas partie de ces faibles que l'on rencontre sans cesse. Tu as le potentiel pour me surpasser et suivre ta propre voie. Je vais te donner alors ma toute dernière leçon. Retiens-la bien, car il s'agit de la plus importante, celle qui éliminera ton principal point faible: ne montre jamais tes faiblesses à tes ennemis, fais de ton visage un masque trompeur. Feins, provoque, amène-les à montrer leurs points faibles, ruse, et frappe.
Il n'y a pas de courage sans force, ni de force sans courage, mais ces deux vertues guerrières sont vaines sans la ruse.
Devient forte ma fille, pour votre mère, pour moi et pour ta soeur. Continue de la protéger, ne perdez pas ce lien qui vous unit, et surmontez ensemble les épreuves que Shillen dressera sur votre route.
Adieu... "

Les deux soeurs restèrent silencieuses. Aucune ne put s'empêcher de relire sa lettre respective encore et encore, cherchant un sens à tout ceci, ou une explication. D'après la lettre, il semblerait qu'il n'y avait aucune raison de les chasser du village, alors pourquoi..? Freyja se releva brusquement, blême. Ondinee l'appela doucement, lui demandant ce qui se passait, mais elle ne l'écoutait pas. Et si il avait fait tout ça pour les... Non, elle ne pouvait pas envisager cette hypothèse! Elle prit son épée, mis son pendentif et la lettre dans sa sacoche, dit à sa soeur d'en faire autant, la pressant de se dépêcher et courut aussi vite qu'elle put au village, sa soeur la suivant de près. Pendant leur course, elle se remémorait les paroles auxquelles elle n'avait guère fait attention par le passé
"Ces humains... Quand cesseront-ils de faire de telles atrocités?
-Il faut qu'on les arrête ou ça sera notre tour!!
-Même les enfants ont été... Quelle cruauté...
-J'ai entendu dire que quelques uns de ces pâles arrogants se joignaient à eux pendant leurs périodes de chasse, si tu vois ce que je veux dire...".
Son pressentiment n'en fût que plus sombre. Ondinee avait cessé de lui poser des questions. Il semblait qu'elle aussi avait compris le danger...

Livre III: La Fin

La nuit tombait peu à peu tandis qu'elles approchaient du village. Mais déjà, elles savaient à quoi s'attendre. Une lueur rougeoyante émanait du village et elles pouvaient déjà entendre les cris et l'entre-choc des épées. Ce fût lorsqu'elles parvinrent à l'entrée qu'elles mesurèrent l'atrocité du combat. Freyja tomba à genoux tant le spectacle était effroyable... Les maisons étaient en flammes. Partout où son regard allait, elle ne voyait que des cadavres d'hommes, de femmes et d'enfants... Certaines femmes étaient dénudés et mutilées, laissant deviner à quel jeu macabre s'étaient laissé aller leurs assassins. Les enfants les plus jeunes avaient été piétinés sans ménagement, sûrement devant les yeux horrifiés de leur famille à en voir la disposition des cadavres... Des éclairs de magie jaillissaient de toute part. Son peuple se faisait massacrer... Puis une pensée surgit.
"Père..."
Elle se rua aussitôt vers leur maison, suivit d'Ondinee, priant pour qu'il ne soit pas trop tard. Partout où elle courait, elle voyait d'innombrables cadavres. Des elfes sombres, des pâles et des humains.
"Maudits soient-ils! " pensa-t-elle.
Les combats ne cessaient pas. Sans doute était-ce la raison pour laquelle personne ne se préoccupaient d'elles. Elles arrivèrent enfin chez elles, l'une des seules maisons encore à peu près intactes. Elles se précipitèrent à l'intérieur au moment où leur père était en prise avec un humain. Bref instant où celui-ci porta son regard sur ses deux filles, bref instant où le lâche profita de cette faiblesse pour planter son épée dans le ventre de son adversaire. Un éclair rouge jaillit, un cri surgit, tandis que le père des deux soeurs gît au pieds de son assassin, mort.
Les yeux révulsés, le corps incapable de réagir, Freyja ne put que se laisser tomber à genoux, sourde aux rires de l'humain et aux pleurs de sa soeur. Le monde n'était plus qu'un vide dans lequel elle venait de plonger... Le seul être qu'elle avait admiré dans toute sa vie était retourné dans les bras de Shillen. C'était fini, elle ne reverrait plus jamais son sourire, son visage... Elle n'entendrait plus jamais ses provocations, ses rires et sa voix... Les souvenirs qu'ils avaient partagés défilèrent dans sa tête: la première fois qu'elle avait tenu une épée, qu'elle en était tombée à la renverse en essayant de la manier et leur père, riant aux éclats, la fièvre qu'elle et sa soeur avaient attrapée en hiver et leur père, restant à leur chevet pour les soigner, les enseignements de Shillen que leur père leur racontait, et elles écoutant avec curiosité, leur dernier entraînement où leur père les a chassé pour les protéger, la lettre qu'il leur a écrite, et elles, surgissant dans la maison, et leur père, recevant le coup fatal, et gisant à présent, mort...

Livre IV: Un masque pour un meurtre

L'humain, riant toujours aux éclats commençait à s'approcher lentement d'elles, un poignard à la main. Ondinee secouait Freyja désespérément, cherchant à la faire revenir à elle. Mais Freyja restait comme sourde aux supplications de sa soeur, jusqu'à ce que celle-ci la gifla avec une force étonnante. La douleur et la surprise lui fit prendre conscience de la réalité. Leur père mort, sa soeur, l'assassin... Elle devait protéger sa seule famille désormais... Elle se releva, brandissant son épée en questionnant l'humain d'une voix tremblante :
"Pourquoi faites-vous ça..? "
Il lui jeta un regard amusé accompagné d'un sourire cruel:
"Vous êtes des hérétiques, tout simplement... Vous avez choisi la voie du démon et vous en subissez les conséquences. "
Il commença à s'avancer lentement. C'est alors que Freyja répliqua, le corps tremblant :
" Vous nous traitez d'hérétiques sous prétexte que l'on ne vénère pas la même déesse... Vous venez nous massacrer en considérant que cela est une raison suffisante... Vous mutilez les enfants et les femmes, et vous osez nous traitez de monstres..? Comme toujours, vous les humains, ne verrez jamais la vérité... les seuls monstres ici, c'est vous!!"
Elle se jeta alors sur l'humain, son épée à la main et combattit comme jamais. Elle ne combattait plus pour s'entraîner ou par jeu, non. Cette fois, elle combattait pour tuer. Pour tuer celui qui a brisé sa vie. Pour tuer celui qui avait pris la vie de son père de bien d'autres encore. Ondinee le voyait, et ce brusque changement semblait la pétrifier. Les mouvements de Freyja s'enchainaient rapidement, mais l'humain parvenait à les parer sans problèmes. Elle frappait, elle frappait de toutes ses forces, mais rien n'y faisait, aucune de ses attaques ne perçaient la défense de l'adversaire...
"Et bien, tu es plutôt rapide dis-moi!! Mais tu es si facile à lire, dommage pour toi!! "
Il lui entailla profondément l'épaule sur ces paroles et projeta la fillette au sol, près du corps de son père. Elle tourna son regard vers le cadavre de son père et se rappela de ses dernières paroles, de sa dernière leçon. Sentant sa soeur plus vulnérable que jamais, Ondinee utilisa sa magie sur l'humain. Celui-ci se détourna alors d'elle, laissant le temps à Freyja de prendre l'épée de son père et de se relever. Elle lança un regard à sa soeur, indiquant clairement qu'elle allait changer de technique de combat, et se mit en position. Elle allait combattre avec deux épées, et mettre en pratique les enseignements de leur père. Analyser les mouvements de l'adversaire, éviter ses attaques, le pousser à montrer ses points faibles et frapper. Si on imagine qu'il s'agisse d'un jeu, la victoire est possible, il suffit d'avoir confiance en soi.
"Et bien? Vous auriez pu me tuer tout à l'heure. Est-ce parce que vous êtes trop lent ou trop empoté pour réagir? "
Elle avait prononcé ces paroles sans peur, par provocation, un sourire aux lèvres. Elle voulait et devait mettre son adversaire hors de lui afin qu'il oublie toute prudence. Il frappa de toutes ses forces, mais elle esquiva à temps.
"Quoique, ça peut être par stupidité aussi, ce qui vous conviendrait le mieux! "
Il frappa de nouveau de toutes ses forces, en vain. Ondinee profita des ouvertures que lui offrait ses attaques pour l'attaquer, tandis que Freyja continuait d'esquiver ses attaques, riant et le provoquant à nouveau. Oui, elle avait réussi à faire de son visage un masque. Le masque de l'insouciance. Ce petit jeu dura près de trente minutes jusqu'à ce que l'humain, exaspéré, décida de changer de cible, et s'élança vers Ondinee. Freyja, s'interposa immédiatement entre eux. L'homme tenta à nouveau de la frapper de son épée, mais ce fut vain. Freyja contre-attaqua et trancha la tête de l'humain à l'aide de ses deux épées. Le sang gicla en une fontaine pourpre, tachant ainsi le visage de la jeune elfe sombre. Le corps tomba au sol, en même temps qu'elle. Elle était à bout de force, elle avait tout donné. Elle resta à quatre pattes, tentant de reprendre son souffle, tandis que sa soeur se précipita sur elle et l'enlaça, soulagée.

Livre V: Le sang et l'espoir

Elles restèrent un moment ainsi, jusqu'à ce qu'un groupe d'humains accompagnés de deux pâles surgirent à l'intérieur. Ils virent tout d'abord le cadavre de l'humain, les deux soeurs, puis le corps de leur père. Ne prêtant pas attention aux fillettes, l'un d'eux s'exclama :
"J'y crois pas!! Il a réussi à tuer celui-là!! Tu sais, Louis, celui qui a eu Armand, Marcus, Flint et tous les autres...
-Mouais, mais on dirait qu'il a pas fait long feu contre deux gamines"
L'un d'eux avait noté les tâches de sang sur le visage ainsi que sur les épées de Freyja. Un autre soupira :
"Je lui avais dit de ne pas boire trop d'hydromel avant le combat... Voilà le résultat"
Ils éclatèrent de rire.
"En attendant, on fait quoi de ces gamines?"
Silence.
"La ptite avec les deux épées ne m'inspire pas confiance, autant la tuer ici, ça serait plus sûr. Quant à l'autre, on la ramène. On doit faire au moins une exécution publique, et comme il ne reste plus que ces deux-là..."
Ondinee serra sa soeur plus fort, mais Freyja se releva tout de même difficilement, prête à combattre. Mais ce fût vain. Sa soeur fût facilement désarmée et emportée. Et que peut faire une enfant, blessée, épuisée face à des hommes adultes et sans pitié? Rien. Elle fût désarmée avant même d'avoir fait un geste et fût brutalement plaquée au sol. Elle ne put que voir sa précieuse soeur, emportée par un elfe et un humain et l'appeler désespérément. Elle voyait ses larmes et sa peur au travers des siennes... Elle rassembla ses forces, tentant de se débattre, cherchant à rejoindre son double, mais un violent coup de pied à sa blessure l'en empêcha.
"Hey doucement!!, protesta un premier
-Ouais faut pas la tuer trop rapidement, c'est la dernière qui reste!
-D'accord, on va y aller doucement alors..."
L'humain se pencha doucement vers elle et lui murmura sournoisement
"N'hésite pas à crier, surtout..."
Face contre terre, elle ne voyait pas les mouvements de ses exécuteurs, mais elle entendit clairement un bruit feutré comme si l'on sortait quelque chose d'une sacoche, puis elle sentit une douleur vive, lancinante dans le bas de sa jambe ainsi qu'un liquide couler... Un liquide à l'odeur caractéristique à laquelle elle avait commencé à s'y habituer: du sang. Elle se retint de crier, ne voulant en aucun cas leur laisser le plaisir de voir sa douleur. Elle se contenta de fermer les yeux et de tenter de penser à autre chose. Nouvelle douleur lancinante. Elle sentait la lame pénétrer sa chair plus profondément et glisser rapidement, la douleur était cuisante. Elle se mordit la lèvre pour ne pas crier, pour ne pas bouger. Elle ouvrit les yeux et tenta de voir le visage de ses bourreaux. Elle pu voir deux rictus, trois rictus.
Oh!! Comme elle les haïssait!! Ces monstres qui massacraient son peuple sans relâche!! Tous ces monstres qui massacraient son peuple par plaisir de tuer!! Comme elle haïssait ces pâles, ses cousins qui approuvaient les actes de ces humains qui les ont un jour trompés!!
"Père, tu n'es qu'un menteur... La paix ne peut exister entre nos races... "
C'était ses dernières pensées... Elle reçu deux nouvelles coupures, toujours plus profondes... Elle sombrait peu à peu dans l'inconscience, son corps était lourd, ses plaies la faisaient souffrir, et elle sentait avec plus d'acuité ce pied qui la maintenait à terre, et son sang qui s'en allait. Est-ce que tout allait finir ainsi..? C'est ce qu'elle pensait, lorsqu'une lumière apparut. De la magie élèmentale..?
Elle perdit connaissance quelques instants, puis, lorsqu'elle reprit connaissance, elle sentait une douce chaleur l'envelopper, et la douleur semblait cesser peu à peu. Elle releva doucement la tête,et vit une silhouette près d'elle. Un homme, plutôt grand, aux oreilles pointues et à la chevelure claire... Un membre de sa race? Non... La Lune dévoilait la couleur de sa peau: un pâle. Elle prit peur un court instant et allait tenter de s'enfuir, lorsqu'elle vit plusieurs cadavres autour d'elle. Des humains et un pâle. Il lui dit doucement de ne pas bouger, qu’il soignait ses blessures et qu’elle était en sécurité. Pour une étrange raison, elle le croyait. Sans doute était-ce parce qu’il n’avait pas hésité à tuer un membre de sa race ainsi qu’une bande d’humains pour la protéger. Une fois hors de danger, il prit ses affaires, les lui rendit, et l’invita à le suivre. Elle ne savait que faire. Elle craignait pour la vie de sa sœur, aussi elle demanda au pâle d’aller la secourir, mais celui-ci répondit qu’elle n’avait plus rien à craindre. Elle le pressa de questions, mais celui-ci ne répondit pas, sortant de la maison. Freyja se résigna donc, jeta un dernier coup d’œil au corps de son père, ferma ses paupières, murmura un faible adieu, et suivit celui qui l’avait sauvé.
Ils voyagèrent ensemble pendant plusieurs semaines. La nuit, la fillette se réveillait avec l’impression d’entendre la voix de sa jeune sœur. A aucun moment, l’elfe ne lui donna son nom. Si bien que le jour de leurs adieux, il restait un inconnu pour elle. Il l’avait amené devant une grotte en disant qu’au fond de celle-ci se trouvait le village des elfes sombres et qu’elle pourra vivre en paix parmi eux. Elle remercia, regrettant tout de même de devoir se séparer de lui. Il lui souhaita bonne chance et commença à s’éloigner en lui disant une dernière fois de ne pas s’inquiéter pour sa sœur. Elle savait qu’il était inutile de le questionner, il se contenterait à nouveau de sourire, comme d’habitude. Ce ne fut que lorsqu’il fut parti qu’elle perçut quelque chose. Un sentiment, une pensée qui n’avait rien à voir avec les siennes. Un espoir, de l’incompréhension et la peur de perdre une personne proche
"Freyja, père… "
-Sœur ? ".
Elle perçut un soulagement, de la joie : les sentiments de sa sœur.. ? Quelle étrange sensation… Elle ne ressentait pas seulement ses propres émotions, elle percevait les siennes également. Quelques images déferlèrent alors dans son esprit. Un elfe et un humain sur leurs montures, un village en flammes s’éloignant, des pleurs, un cri, puis une lumière rouge sombre, suivie de la vue des cadavres des deux hommes et une silhouette d’homme sur un rocher, puis la vue d’une maison tenue par des elfes sombres dans les montagnes. De toute évidence, Ondinee était saine et sauve. Freyja sourit et se concentra sur des souvenirs de ces derniers temps. Elle perçut à nouveau le soulagement de sa sœur, et était sûre qu’il en était de même pour elle. Quel étrange phénomène tout de même... Enfin, elle était vivante et cela lui suffisait. Elles pourront se retrouver désormais, elles n'étaient plus totalement seules. Elle observa le soleil couchant en pensant aux paroles de l'elfe, à ce qu'il avait fait, et sourit.
"Oui, Père, il semblerait qu'il y ait tout de même un espoir en ce monde... "

Freyja revint à la réalité et se retourna. Il lui avait semblé entendre un bruit... Ne percevant aucun signe de vie, elle se perdit à nouveau dans la contemplation du lac, son pendentif toujours serré dans sa main pendant un long instant avant d'ouvrir celui-ci. Deux photos étaient placées sur les parois intérieures du médaillon. Une montrait une magnifique elfe sombre, leur mère dont aucune ne gardait le souvenir, et leur père. Chacun portait un bébé dans les bras: elle et Ondinee. La deuxième était plus récente. Elle représentait les deux jumelles et leur père. Elles ne devaient avoir qu'une vingtaine d'années à l'époque...
Elle rangea son pendentif, reprit ses deux épées et plongea, nageant en direction de Giran. Il est temps de poursuivre les recherches...

En Prison

Faible... Si faible... Je tirai sur mes chaînes, sachant que cela ne changerait rien. Je tournai la tête vers Evidence. Ses blessures se rouvraient peu à peu, et je ne pouvais rien faire à part lui dire de se calmer... Je tournai ma tête vers la gauche. Satalis dormait... Je l'observais un long moment, observant la blessure qu'ils lui avaient affligés, observant son expression... Et je regardai mon propre corps, mes propres blessures... Blessures superficielles comparées aux leurs... J'en ressentis un sentiment d'amertume, d'injustice... Quelle ironie du sort! C'était celle qui avait pris la vie d'un garde et grièvement blessé deux autres qui était la mieux traitée... Enfin, mon sort m'importait peu. J'aurais préféré que mes deux compagnons soient mieux traités... J'aurais préféré être à leur place, et eux à la mienne... Lorsque l'on nous a enfermé, je n'ai opposé que peu de résistance, je n'ai rien fait... Tous deux utilisaient leur magie, tous deux les narguaient, les menaçait, et que pouvais-je faire, moi? Rien... Je ne suis qu'une faible...

Je m'allongeai silencieusement contre le mur, tentant de m'approcher un peu des barreaux...

Toute ma vie, depuis que j'ai quitté le village, n'a été que faiblesse... Il y avait tout d'abord ce pâle... Aerandir... Je l'avais aimé. J'aimais sa douceur, sa gentillesse, sa tolérance et autres traits de son caractère... Bien que je ne lui ai jamais avoué mes sentiments -et heureusement que je ne l'ai jamais fait- je ne savais que trop bien que mes gestes et mon comportement les trahissaient. Mais au fond, je pense que je souhaitais qu'il le sache... Stupide erreur... C'est justement parce qu'il les avait remarqué qu'il est partit. Lorsque je le revis après des semaines d'absence, il semblait avoir changé de sentiments à mon égard... Je l'ai aimé, et voici mon prix. La honte, la douleur, la fureur et... mon réveil.
Oui, le réveil de cette créature tapis au fond de moi... Cette créature qui attend, affamée que le jeu commence... Cette créature qui, depuis mon premier meurtre, aime jouer avec le sang.
Bien sûr, ce n'est pas comme si elle était éveillée en permanence. Elle ne sort qu'en certaines occasions... Lorsque la souffrance laisse place à un désir d'autodestruction, ou lorsqu'on l'invite gentiment à se manifester.

Il y a ensuite les autres races... Ma tolérance apparente a souvent failli me faire passer pour une paria auprès des miens. Evidence me l'a gentiment montré en me lançant trois lames dans le dos lorsque je me suis interposée entre Grahad, une autre sombre et deux humains que je tentais de protéger. Mais bon... Après quelques explications, la situation s' éclaircie généralement comme ce fût le cas. Mais cela me force à faire des choix... Protéger mon image auprès des autres races, ou soutenir les miens? Je préfère ne pas y penser pour le moment. Il n'y a aucune raison pour que mon masque tombe maintenant, donc laissons l'avenir en décider. Mais ce qui est sûr, c'est que jamais je n'abandonnerai mon peuple.

Et maintenant, il y a lui... Lui qui me perturbe sans cesse, lui qui m'attire inexorablement... Je lutte, mais je ne montre que davantage de faiblesse à son égard... Mais je ne ferai plus la même erreur... Je ne DOIS plus faire la même erreur. Il s'amuse avec moi comme je joue avec lui. Il est mon semblable d'une certaine manière... Le contraste entre sa malveillance et son apparence me fascine. Un loup dans un corps d'homme...
Je souris à cette pensée.
Un loup que j'ai bien envie d'apprivoiser... C'est cela notre jeu, du moins en ce qui me concerne. Qui saura apprivoiser l'autre en premier? Il m'a montré quelques signes de faiblesses pour l'instant. Bien qu'il parvient à semer le doute dans mon esprit aussitôt après... Par deux fois, il m'a donné des envies de meurtre. Si seulement je pouvais en faire de même pour lui. Voir la rage déformer ses traits, le voir perdre le contrôle de lui-même, et voir tout ce qu'il cache en lui surgir pendant un bref moment. C'est jouer avec le feu, me direz-vous, mais c'est justement ce que j'aime. Et puis, si il me blesse ou autre, quelle importance? Notre dernier "jeu" a failli me coûter la vie, mais une fois terminé, je ne l'ai jamais vu ainsi... Je crois que je n'ai jamais été aussi... Enfin, bref. Je préfère ne pas trop m'ouvrir sur le sujet. Ondinee semble avoir parfaitement deviné ce qui s'est passé, mais il faut que j'en sois sûre. Je pense que cela serait amusant de lui en parler, après tout, n'est-elle pas ma soeur jumelle? Ne sommes-nous pas liées par le Lien?

Je soupirai.
Vivement qu'on nous libère, cette prison est à mourir d'ennui. Les passants nous jettent des regards curieux à travers la herse fermée, d'autres nous espionnent. Je les hais. Surtout ceux qui nous ont enfermé sans nous donner la possibilité de nous défendre, de justifier nos actes. Et Giran est censée être une ville libre? Il suffit de voir les regards chargés de haine et de mépris que nous jettent ces humains pour le démentir. Oh! Comme je les hais! Si seulement je pouvais briser mes chaînes. Si seulement je pouvais détruire ces barreaux... Si seulement j'avais une arme quelconque... J'aurais pris tant de plaisir à les...
Je portai ma main vers ma bouche et la mordis profondément, suçant le sang s'écoulant de la blessure. Satalis s'était éveillé et me regardait avec un mince sourire aux lèvres, murmurant "Vampire." d'un air amusé.
Je lui adressais un sourire tout en continuant de lécher mon propre sang. C'était le seul moyen pour ne pas céder à la haine. Le seul moyen pour calmer cette envie de tuer tous ces gardes, le seul moyen pour calmer mon envie de meurtre, et cette... chose en moi, le seul moyen pour ne pas empirer notre situation.
Je le regardais tirer sur ses chaînes de toute ses forces. Je souris. Qu'il était agréable de le voir se débattre, tentant de briser ses chaînes. J'aimais vraiment le voir lutter ainsi, cherchant à retrouver sa liberté... Comme... Un loup.

« Ka fol Yah crupen udossa, jalbyr dormagynen udossa »
C’est par ces paroles que tout commença.
C’est par ces paroles que j’acquis ma liberté.
Et voici l’histoire qui m’a été comptée et celle que je crois, au plus profond de mon âme noire.


Naissance de la puissance – Le chef d’œuvre des Dieux.

Gran Kain était un dieu de destruction. Quand il vit le travail d'Einhasad, il devint curieux et jaloux. Il imita Einhasad et créa un être à sa propre image. Puis il alla voir chacun de ses enfants, pour que comme avec Einshasad, chacun insuffle à sa création, un pouvoir, une volonté. Après quelques hésitations, chacun d’eux accepta, mais ils donnèrent les restes à leur père.

Satisfait, Gran Kain pris tout ce qui lui avait été donné et cria : "Regardez la race que j'ai créée. Regardez comment elle est née de l'esprit de l'eau, du feu, de la terre et des vents. Elle sera plus forte et plus intelligente que les géants ! Elle contrôlera le monde !"

Gran Kain cria avec fierté et insuffla les esprits dans les créatures à son image. Cependant, le résultat fut désastreux. Ses créatures étaient faibles, stupides, maladroites et lâches. Tous les autres dieux dédaignèrent les créatures de Gran Kain. Submergé par la honte de son échec, Gran Kain abandonna ses créatures et disparu pour un temps. Ces êtres sont appelés humains.

Gran Kain revint alors. Et séduisant sa fille aînée, il fini par insuffler en elle la vie. Mais Einsahad, prit d’une colère féroce, bannie sa fille. Shilen donna alors naissance, dans la douleur, à des Démons, à des Dragons et dans son infinie souffrance, dans ses douleurs immenses, elle pleura. Elle pleura, alors que Einsahad l’avait dépouillée de sa position de déesse des eaux. Elle pleura des larmes noires, des larmes d’encres, des larmes sombres. Ainsi naquit la race des Elfes Noirs…
Le chef d’œuvre des Dieux. Le chef d’œuvre de Gran Kain notre père à tous !

Ces elfes à la peau noire se fondirent au cœur du peuple elfe. Fils et filles de Shilen, il semblait qu’il ne pouvait en être autrement.
Mais alors, une lutte entre les Elfes et les humains débuta. Une guerre qui dura des années, des siècles. Une guerre qui fini par lasser les sylvains et la majorité d’entre eux fini par se retirer, alors que quelques uns se battaient encore pour détruire les créatures imparfaites de Gran Kain. Une scission se fit, entre les belliqueux et les autres, plus désireux de retrouver une paix qu’ils ne connaissaient plus.
Gran Kain surveillait de loin cette lutte intestine et surtout ses enfants, son chef d’œuvre. Il décida de revêtir les traits d’un humain du nom de Dasparion. Se présentant au groupe des elfes noirs, il leur proposa de leur apprendre les secrets de la magie noir. Ils acceptèrent et Gran Kain les modela, les marqua. Il fit de ses enfants, des êtres parfaits. Il avait enfin réussi à créer une race unique, une race à son image, une race vouée à la destruction.


Les fondements du Culte – Née d’un mâle, la puissance est masculine.

Voici les fondements et valeurs de la croyance :
Nous sommes les porteurs du Divin. Nous sommes fait à son image. Nous sommes puissance, honneur, fierté et liberté. Nous sommes destruction !
Tout kaïniste se doit d’honorer Le Père comme il honorerait sa propre liberté.
Tout kaïniste se doit d’honorer et de respecter Shilen, Mère de tous les elfes, comme il respecte toutes les femelles de la race.
Tout kaïniste se doit de s’informer pour que sa liberté soit totale. L’ignorance est le lien des esclaves.
Tout kaïniste se doit de porter en lui les larmes qui l’ont fait naître.
La faiblesse est une entrave à la liberté. Aucune faiblesse n’est permise pour un kaïniste.
Nous sommes nés d’un mâle, la puissance est masculine. Aussi, seuls les mâles peuvent se permettre de parler au nom du Père.
Nous sommes la perfection. Toute autre race est le déshonneur des Dieux. Les humains sont la honte du Père. Ils ne sont pas à combattre, ils ne sont pas à détruire. Ils sont à dédaigner, ils sont à maudire. Aucun kaïniste ne doit perdre son temps à côtoyer d’autres races.
Le but de tout kaïniste est de devenir plus puissant, plus fort, pour faire honneur à la grandeur de l’éternel. La force réside dans la connaissance. La puissance réside dans la liberté !

« ja'hai vel'bolen dos ph' lu' dos orn tlu duul'sso saph l' su'aco
drill telanth dos d'ril tlu duul'sso zhah ulu valbyl ulu gareth jabbressen
tlu duul'sso, ol zhah tlu maglust»

(Accepte qui tu es, et tu seras libre comme le vent.
Mais dis toi bien que d’être libre s’est se lier à la plus dure des maîtresses.
Être libre c’est être seul.)

Hmm... Ainsi Dasparion était donc Gran Kain... Cela me facilite la tâche en ce cas. Quels stupides humains... En pensant ramener un puissant sorcier de leur race, c'est le Père qu'ils vont attirer à eux... Cela promet d'être intéressant... Du moins, si ils parviennent à leurs buts. Enfin... Ils me seront très utiles, d'autant plus que je leur dois la vie. Je suppose qu'il serait regrettable de ne pas les aider, non? Il me faudra juste agir dans l'ombre. Comme d'habitude.

Freyja sourit légèrement, ses yeux parcourant le parchemin avant de s'arrêter sur le comportement à adopter envers les autres races.

Quel gâchis de gaspiller autant de "jouets"... Franchement, on a bien le droit de s'amuser avec eux, non? Et puis, ils peuvent se montrer utiles.

Elle soupira longuement avant de plonger son regard dans les profondeurs du fleuve. Ses eaux s'agitant sans cesse, semblaient l'appeler, lui dire de cèder à cette bataille en elle, mais le fallait-il..? Tant de choses se sont passées depuis leur libération...

La rencontre

Il y a d'abord la source principal de son tourment. L'être qui faisait partie intégrante de sa chair et de son âme. Elle devait le tuer, elle n'avait pas le choix. Après tout, quel aurait été son futur, sinon la haine et la souffrance? Rien. L'impuissance s'insinuait déjà peu à peu en elle. Ce fût grâce à Kajira, l'un des très rares êtres en qui elle plaçait toute sa confiance qu'elle put règler ce problème. Une potion. C'est ensuite au Village des Chasseurs, en quête des ingrédients nécessaires, qu'un deuxième choc se fit. Alors qu'elle se dirigeait vers les montagnes, ses yeux se posèrent sur un pâle à la silhouette familière... Un pâle qu'elle ne croyait jamais revoir...

"Ae...randir..." Le pâle leva un visage étonné vers elle sans la reconnaître: son capuchon lui couvrait la moitié du visage.
"Vous me connaissez, Dame?" Elle détourna un instant le visage. Pourquoi était-il ici? Pourquoi maintenant?
Il se mit à lui demander d'où lui venait la connaissance de son nom. Elle répondit qu'elle avait entendu parlé d'un éleveur de licorne par une amie du nom de Ondinee. Il lui demanda aussitôt si il connaissait une dénommée Freyja. Son coeur cessa de battre un instant. Se pouvait-il qu'il ne l'avait pas oublié depuis tout ce temps..? Il ne semblait savoir combien de temps s'était écoulé depuis son départ, son air était mélancolique... Lorsqu'il l'interrogea sur la raison de porter un capuchon, elle ne pût s'empêcher de lui laisser voir son sourire, déclarant être une criminelle recherchée. Il eut un air amusé, quand ses yeux s'attardèrent sur ses lèvres, brillant d'une lueur nostalgique. Il tenta alors de découvrir l'identité de son interlocutrice, lorsque celle-ci baissa la tête, réajustant son capuchon. Si il savait la vérité... Elle ne pourra jamais se le pardonner...
C'est alors qu'ils furent interrompus par un orc et un humain. Deux bellicistes d'après ce qu'elle pouvait constater, et étonnament rustres. Ceux-ci s'en prirent à Aerandir. Ce ne fut que lorsque Freyja intervint que le combat devint inévitable. Cela devait se règler en duel entre elle et l'orc. Pourtant l'humain et l'elfe furent de la partie par la suite. Elle ne s'inquiétait pas en ce qui concernait le résultat de son combat. L'orc semblait plutôt faire partit de ceux qui aboyaient au lieu de mordre. Un vantard belliqueux... En revanche, elle voyait bien qu'Aerandir ne s'était pas entraîné depuis tout ce temps... Face à cet humain, il n'avait aucune chance. Et si en plus, elle doit le combattre en plus de l'orc... La situation serait délicate, d'autant plus qu'elle doit s'arranger pour que son visage ne soit en aucun cas découvert...
L'issue du combat fut telle qu'elle l'avait prédit. L'humain, victorieux, prêta aussitôt main forte à l'orc. Deux contre un... Ces sous-races sont si lâches, c'en est effrayant... Freyja fût mise à terre. Qu'à cela ne tienne. Elle aura tout le temps de prendre sa revanche plus tard. L'orc semblait d'ailleurs souhaiter la combattre seul à seule un jour prochain... Oh comme elle avait hâte.
Une fois à peu près rétablis, ils discutèrent un peu. Il la regardait étrangement, un sourire aux lèvres. C'est alors qu'il fit plusieurs remarques, disant qu'elle lui rappelait celle qu'il avait aimé. Il sollicita la faveur de voir son visage. Elle refusa. Elle savait qu'il avait découvert son identité, du moins, ce n'était qu'une flamme d'espèrance qui brillait dans un coeur plonger dans le regret du passé... Son pressentiment fût confirmé lorsqu'elle se releva, lui tournant le dos et qu'il s'approcha d'elle pour lui murmurer:
"Dis-moi ton identité, ou tu l'entendras de ma bouche..." Pourquoi fallait-il qu'il se fasse souffrir autant..? Pourquoi fallait-il qu'il LEUR fasse tant de mal..?
Elle continua de nier être celle qu'il avait pourtant si bien vu en dessous de la cape et de la capuche... Il n'insista pas, blessé... Il l'accompagna tout de même chez l'apothicaire Malek, mais attendit dehors. En voyant la liste des ingrédients nécessaires, l'humain demanda à Freyja de quoi elle souffrait. Ne sachant pourquoi, elle se mit à lui raconter son dessein, et les raisons qui la poussaient à prendre cette extrémité. Il lui fallut toute son énergie pour le convaincre de l'aider. En apprenant ce qu'elle comptait faire, l'apothicaire devenait réticent à lui donner les ingrédients, mais accepta finalement, touché par son histoire et par sa vive souffrance...

Dans la chair de ma chair, et pour toujours...

C'est à l'abri des regards qu'elle but le breuvage. Hélas, il eut un effet secondaire. La tête lui tournait, elle commençait à avoir des suées... Elle se réfugia sur le bord du fleuve près du pont Nord de la ville et perdit connaissance.
Lorsqu'elle se réveilla, une douleur atroce lui prenait le bas-ventre. Elle prononça un nom, et vit deux femmes et une panthère penchées sur elle. Elles se trouvaient dans une grotte sombre, mais vaguement aménagée. L'une de ses bienfaitrices, Amélia, lui fit boire une potion afin de stopper sa fièvre. Celle-ci retomba aussitôt, suivie des sensations de vertiges, mais les contractions augmentaient d'intensité. Elle accouchait. Lorsqu'Amélia le comprit, elle lui donna le breuvage adéquat. Ses contractions cessèrent. Elle la questionna alors sur le devenir de l'enfant. Sauver l'enfant, qui était surement déjà mort en elle, et mettre sa propre vie en péril, ou alors briser l'âme de sa progéniture, lui épargnant ainsi les souffrances de la mort.
Freyja opta immédiatement pour la deuxième solution. Après tout... Elle l'aimait son enfant. Plus que tout. Seulement... Quel avenir aura-t-il? Elle savait ce qui lui arriverait une fois mis au monde. Il connaîtrait le mépris, la solitude, et la douleur. Elle ne pouvait lui imposer ceci. C'était pour cela qu'elle avait choisi de lui donner la mort en son sein.
L'humaine incanta alors un sort. Pendant un bref instant, Freyja put voir le visage de l'enfant qui aurait dù naître. Son coeur se serra. Amélia lui expliqua qu'il s'agissait de l'âme de son fils et que celle-ci se répartirait à travers tout le monde pour fusionner avec celles de tous les nouveaux-nés ayant vu le jour en cet instant précis. Ses paroles lui étaient rassurantes. Au fond, il vivra finalement, même si ce n'était que dans le corps d'un autre. Il ne souffrira pas... C'était mieux ainsi.
Elle lui promit par la suite de l'aider dans sa quête de l'immortalité et de l'invincibilité et passa un "pacte". Après tout, elle lui devait le repos de son fils, ainsi que sa propre vie.

Mon sang dans le tien, et ma chair dans la tienne,
Ensemble, nous vivrons éternellement et ce, pour les siècles des siècles.

Conséquences

Les jours passèrent. Aerandir la trouva sur l'île où ils avaient pris l'habitude de se retrouver par le passé. Il la reconnût et vît en elle sa mystérieuse interlocutrice des nuits précédentes. Il la harcela de questions, l'accusait de lui avoir mentit. Elle ne pouvait se défendre autrement qu'en déversant sa rancoeur. Son âme se déchirait. Pourquoi fallait-il que cela se passe ainsi..? Pourquoi fallait-il qu'il souffre..?
Bien que cela aurait tout arrangé, elle ne pouvait lui dire la vérité. Elle ne pouvait le tourmenter davantage... C'est alors qu'il prononça les paroles qu'elle avait toujours redouté d'entendre. Celles qui ne pouvaient que la mutiler davantage. Elle s'enfuit, c'en était trop. Elle voulait être en sécurité, loin des questions, loin de la peur, loin de tout.


En ville, elle faillit percuter Satalis. Elle était soulagée de le voir, surtout qu'elle savait que l'elfe ne la laisserait pas s'enfuir. Celui-ci, voyant qu'elle était à bout, l'entraîna doucement dans une ruelle isolée et la força à lui raconter ce qui se passait. Elle le suppliait silencieusement d'abandonner. Elle ne pouvait lui dire... Elle savait très bien ce qui allait se passer si elle se confiait. Mais c'était comme si sa volonté s'était envolée dans sa fuite. Elle se laissa aller à la confession, perdue.

Les jours qui suivirent, elle ne put s'empêcher d'imaginer que chacun devenait distant avec elle. Elle ne pouvait s'ôter l'idée qu'elle devait souffrir pour venger la mort de son enfant. Elle devenait faible.
Elle ne se ressaisit que plus tard, une fois qu'elle se fût habituée à l'idée qu'elle n'avait rien fait de mal. Qu'il ne pouvait en être ainsi. Elle avait tué son fils, certes, mais elle l'aimait. C'est tout ce qu'il y avait à dire. Elle assumait son acte.
Elle se retrouva pourtant, quelques peu changée. Désormais, son penchant pour le danger, le sang et le jeu n'étaient que plus grands. Lorsque ceux-ci se manifestaient, on pouvait vaguement distinguer une ombre remuant dans ses yeux.
Les poisons l'intéressaient. Aussi, elle se mît à les étudier auprès d'Amélia. Son préféré demeurait le curare. Un poison paralysant dont elle enduisait les petites lames cachées au bout des doigts de ses gants. Ce n'est plus tard, après avoir retrouvé Grahad et Satalis qu'elle reçu le parchemin. Oh! Elle les suivrait. Cela était certain.

Freyja enroula le parchemin et le rangea avec précaution. Les jambes par dessus la balustrade du pont, elle observait la Lune se lever lentement au dessus de la surface du fleuve. Tant de changements s'opéraient en elle...
Elle entendit un bruit derrière elle. Sans se retourner, elle bascula son corps en avant et se laissa tomber dans les eaux parfois calmes, parfois tumultueuses du serpent d'eau.

"La vie est un jeu. Voulez-vous jouer avec moi?"

Une ombre remuant doucement dans ses yeux, un sourire malin joua sur ses lèvres tandis qu'elle que la masse glacée la frappa subitement. Le contact fût violent, mais qu'il était doux de se laisser ensuite glisser dans un monde où le rêve et la sensualité ne font qu'un.

Le village de l’oubli


Le village des elfes sombres… Un lieu de salut pour toutes les victimes des génocide, pour tout notre peuple, et un lieu de danger pour tous ceux n’appartenant pas à cette race…

Cela faisait bien longtemps que Freyja ne s’était pas rendue au village. A son retour, elle fût étonnée de voir qu’il s’y déroulait davantage d’activités. Etonnée aussi, de voir que les membres des races inférieures avaient la permission de se promener librement dans leurs rues. Evidemment, cela entraînaient quelques…« incidents » qui diminuaient considérablement le nombre de visiteurs. Elle leva les yeux vers la main de pierre, contemplant la douce lumière invoquée. Enfin elle était de retour chez elle. Elle se remémora son arrivée. La Valsharess de l’époque l’avait accueillit et lui avait offert un refuge dans k’auberge du village. Freyja savait que personne ne s’occuperait d’elle, hormis pour l’entraîner au combat et lui parler de Mère et des autres races. Elle les écoutait, mais n’était pas en accord avec leurs principes, leurs idéaux. Ils étaient différents d’elle. Par conséquent, elle passait beaucoup de temps dans la forêt bordant la grotte à s’entraîner, grimper et se promener. Mais un jour, alors qu’elle chassait, il s’était passé quelque chose… Une…
Elle secoua la tête pour sortir de ses rêveries. Elle ne gardait plus aucun souvenir de ce passage. Tout ce dont sa mémoire se rappelle de cette époque, c’est son réveil dans la forêt deux ans plus tard, avec ces marques sur son bas-ventre… Une cicatrice faisant la largeur de son ventre recourbée vers le haut. De nombreuses autres, plus petites étaient réparties sur toute sa longueur, créant ainsi une arabesque partant de son intimité. Elle avait était terrifiée. Qui a pu lui faire ça ? Comment ? Que lui était-il arrivé pendant tout ce temps ? Elle cherchait à obtenir des réponses en interrogeant la Prêtresse et la Valsharess, mais rien n’y fit… Personne ne savait ce qui lui était arrivé.

Dans les montagnes égarées, dans les forêts désertées, prédateur au doux visage, contemple en ta victime ta propre image. L’image de ton âme damnée, l’image de ton âme déchirée.

De nouvelles rencontres

C’est alors qu’un sombre la fît revenir à la réalité. Il se présenta comme étant Ikrel, le médecin du village. Il possédait une chevelure rougeoyante parsemée de mèches blanches ainsi que des yeux bleus azur. Elle ignorait si c’était son apparence qui lui en donnait l’impression, mais elle sentait comme… Quelque chose qui émanait de lui… Une sensation qui ne lui était pas totalement inconnue…
Il engagea alors la conversation, remarquant qu’il ne l’avait jamais vu au village. Elle esquissa un sourire, répondant qu’en effet, elle n’était pas revenue ici depuis son départ. Voyant son incompréhension, elle précisa qu’elle avait passé beaucoup de temps dans la capitale et à voyager un peu partout. Il eut un air désapprobateur et déclara qu’il ne comprenait pas comment elle pouvait côtoyer les autres races. Elle lui expliqua qu’elle ne les aimait pas en général, mais qu’elle savait en apprécier quelques uns.
C’est alors qu’une sombre du nom de Keicha arriva et se mêla à la conversation. Freyja leur expliqua que leurs différents point de vue partaient du fait qu’ils n’ont pas reçu la même éducation et vécu les mêmes situations. Elle leur raconta alors son passé. L’attaque des humains, sa sœur, son premier meurtre, et l’elfe qui l’avait sauvé. Elle attira leur attention sur le fait que si l’elfe n’était pas intervenu, elle aurait été morte, et quand bien même si elle s’en était sortit miraculeusement, sans son intervention, elle aurait sûrement tuer tous les humains et elfes qu’elle avait croisé sur sa route. Ses deux interlocuteurs semblaient surpris par son histoire. Ikrel lui demanda si il avait agit ainsi pour mieux abuser d’elle ou l’utiliser. Elle affirma que non, disant qu’il n’a fait que la protéger, la soigner et l’emmener au village. Il ne lui a jamais dit son nom et elle ne l’a jamais revue. Il devint perplexe par sa réponse. Keicha, quant à elle, semblait envieuse du Lien qui l’unissait à sa sœur. Elle lui expliqua que sa sœur ne lui avait jamais donné des marques d’amour, de tendresse et autres. Cela la chagrinait. Freyja sut alors qu’elle était la sœur de Grahad et d’Evidence lorsque celle-ci apparut derrière elle. C’était des faux triplés, mais on voyait tout de même une nette ressemblance entre les deux femmes.

Une mystérieuse jeune fille…

Peu après leur départ, une autre sombre apparut. Très jeune. Probablement dans les quatorze ans. Elle semblait perdue, apeurée. Elle essayait de leur parler, mais ne parvenait pas à prononcer un mot. Sans savoir pourquoi, Freyja eu le désir de la protéger. Elle lui parla d’une voix douce, lui adressant un sourire rassurant et se présenta. La jeune fille ignorait où elle était, ni ce qu’elle était. Elle dit s’appeler Heldwige. Elle lui répondit qu’elle se trouvait au village des elfes sombres, qu’elle était en sûreté ici. Elle tendit alors son bras contre le sien après avoir retiré son gant pour lui montrer qu’elle faisait également partie de cette race. Elle se sentait un peu plus en confiance avec elle, mais restait toujours agitée. Elle avait peur d’avoir été une mauvaise personne, elle avait peur d’avoir commit des actes qu’elle ne commettrait pour rien au monde à présent. Freyja lui assura que si tel était le cas, le fait d’être amnésique peut être considéré comme le départ d’une nouvelle vie. Les remords qu’elle éprouve même dans l’oubli, suffisent à payer sa dette. Si elle était une personne immorale, elle ne l’était plus.
Ces paroles suffirent à la faire sourire, la rassurant. Ikrel lui proposa alors de travailler et de dormir à l’auberge du village. Elle accepta, mais s’évanouit aussitôt. Ils la ramenèrent alors à la maison des soins et la déposèrent sur un lit. Elle était pâle. Ikrel s’approcha alors d’elle et lui prit les mains, se concentrant. Freyja observa attentivement la scène. Ils restèrent ainsi pendant un moment, immobiles. Dés que leurs mains se détachèrent le changement fût surprenant. Heldwige était remise sur pied, ne comprenant pas ce qui s’est passé. Le médecin en revanche, semblait épuiser. Voyant cette « inversion » d’état, elle pensa à un transfert d’énergie vital, si bien que lorsqu’il lui demanda si elle était blessée, elle refusa. Ils discutèrent un moment jusqu’à ce que le mâle, épuisé leur fit prendre congé.
Freyja amena alors sa protégée à Giran afin de lui montrer les différentes races qu’elle pouvait rencontrer et lui parla d’elles. Elle aimait s’occuper de son éducation, mais elle savait qu’elle ne pouvait l’éduquer seule. Après tout, elle n’était pas un exemple à prendre. Seulement, il lui restait à trouver un endroit pour dormir. Certes, il y avait l’auberge du village, mais… Elle préférait dormir avec elle chez un ami. Elle alla donc à Goddard pour demander de l’aide à Kajira. Celui-ci leur proposa à boire et à manger ce qu’elles acceptèrent. Heldwige était intimidée. Les deux amis le voyaient bien. Ils tentèrent donc de détendre l’atmosphère en se lançant les habituels sarcasmes amusés. La jeune fille s’endormit sous l’effet de l’alcool, sous le regard étonné de Kajira. Elle se réveilla en sursaut criant le nom d’Ezekiel, un démon d’après ses dires. Décidant qu’elle avait besoin de repos, ils allèrent à l’auberge de la ville, où l’orc réserva une fois de plus la suite des chefs du clan Amtacks. Freyja protesta faiblement comme à son habitude, mais il la fit taire, si bien qu’elle ne pût que sourire.
Elle sut que la nuit fut agitée pour la jeune sombre. A son réveil, elle lui parla d’une grotte et toujours de ce même démon. Elle ne voulait pas s’en rappeler, elle avait peur de ce qui lui était arrivé. Elle tenta de la rassurer du mieux qu’elle pût.

Evènements de la vie de tous les jours

Le lendemain, elle vit un humain et un nain dans le village. Ils discutèrent jusqu’à ce qu’un chakram de vent fondit sur le nain. Celui-ci l’évita de peu grâce à sa petite taille.
« Tiens, ça c’est de la part d’Evidence. » pensa-t-elle, amusée. En effet, elle reconnaissait bien là son type de combat. Attaquer de loin, se cacher et attendre le moment où l’attention de la cible se relâche. Ca l’amusait de la voir jouer au chat et à la souris avec ce nain. Comme elle l’avait prévu, Evidence ne resta pas sur cet échec. C’est ainsi que trois lames fondirent à nouveau sur le pauvre homme, dont deux se plantant dans son ventre. Détournant son regard de la scène, Freyja commença à parler avec l’humain. Celui-ci s’étonna qu’elle ne l’ai pas déjà menacé ni même qu’elle ne vienne en aide à son "ami" nain, voyant qu’il était tombé sur la coupable et que Grahad se mêlait de la partie. Elle rit, lui disant de se méfier qu’elle ne vienne pas lui rendre une petite visite dans son sommeil. Il trouvait l’idée très plaisante, lui intimant de rester silencieuse lorsqu’elle entrera dans la maison pour ne pas réveiller les naines. Il lui indiqua même l’emplacement de la maison, espérant passer une "nuit torride". « Amusant cet humain … » pensa-t-elle avant de partir.
Les jours qui suivirent furent assez éprouvants. Heldwige était trop faible pour l’instant. Elle côtoyait souvent des humains et allait même jusqu’à s’attacher à eux. Elle semblait considérer Freyja comme sa mère, si bien qu’elle l’appelait par cet attribut. Elle s’étais sentie gênée au début, surtout après avoir perdu un enfant, elle pensait que jamais on ne l’appellerait ainsi : elle se trompait et sa tendresse envers Heldwige n’en fût que renforcée. Elle lui conseillât tout de même de ne pas révéler ses sentiments aussi facilement. Surtout face à un humain. Elle voyait bien que sa "fille" commençait à se créer peu à peu une image de déviante. Elle était inquiète. Elle lui dît d’aller voir La Valsharess ainsi que la future Grande Prêtresse afin de parfaire ses connaissances et prendre part à la vie du peuple. Elle l’encouragea à fréquenter d’autres sombres également. Il lui fallait retrouver une identité avant d’affronter le monde extérieur.

Un lien ?

Les jours passèrent et Heldwige semblait revenir sur le droit chemin. Elle suivait les conseils qu’on lui prodiguait et écoutait attentivement les conversations, créant sa propre opinion. Son amour pour Freyja grandissait encore et toujours, tandis que Freyja se sentait chaque jour un peu plus responsable d’elle et attachée. Pourtant, quelques faits étranges la troublait… Une fois, au village, Grahad insista sur le fait qu’elle pouvait être sa véritable mère. Bien entendu, elle écarta cette hypothèse, disant qu’elle n’avait mis qu’un enfant au monde. Un fils, mort avant la naissance. Il continua, cependant, lui faisait remarquer que la ressemblance était troublante. Son inquiétude prit de l’ampleur. Elle ne pouvait avoir mis d’autres enfants au monde, c’est impossible… En comparant leur âge respectif, cela signifie que si cela est vrai, elle l’aurait mis au monde à l’âge de onze ou douze ans ? C’est impossible. Elle déclara à Grahad de ne pas se souvenir d’avoir été enceinte à onze ans et s’interrompis. Evidemment qu’elle ne s’en souvient pas… Elle ne se souvient de rien. Elle se mordit la lèvre, pensant à ses cicatrices. Que pouvaient-elles signifier ? Et comment pouvaient-elles avoir le Lien toutes les deux si elles ne sont pas du même sang.. ? Elle continua de nier. La vérité serait trop difficile à affronter… Surtout maintenant…

Des jeux dangereux

Elle rencontra aussi un buveur de sang du nom de Yui. Ne cachant sa nature qu’à peine, et particulièrement… Singulier, Freyja paraissait plutôt intriguée. Contrairement aux sombres qu’elle avait eu l’habitude de voir, celui-ci ressemblait plus à un enfant dans un corps d’adulte à la fois charmant, joueur et dangereux. Il était impossible pour elle de le définir autrement que par le mot "étrange" c’est alors qu’il répliqua « Etrange, je l’étais avant. Maintenant je suis fou. » avec une mine si sérieuse qu’elle ne put réprimer un éclat de rire. Il est possible qu’elle le laisse boire son sang plus tard. Après tout… N’est-ce pas dangereux ?
D’ailleurs, ses jeux lui ont valu des ennuis. Satalis et Grahad, s’amusant avec Lyam, un humain venant tout juste de rejoindre le groupe d’Amélia, les gardes intervinrent. Craignant de les voir emprisonnés, elle décida de semer le doute dans les esprits. Elle joua donc le rôle de la pauvre sombre violée par le vil humain, prenant un air apeuré, résigné et les larmes aux yeux. Elle demanda à ses amis d’une voix faible de laisser tomber, que tout était de sa faute. Satalis la prit doucement dans ses bras, lui disant de ne pas s’inquiéter. Elle ne se prit que davantage au jeu, appréciant en même temps de pouvoir s’y blottir. Au sortir de la ville ils apprirent que l’humain s’était plaint aux chefs de Freyja… Amélia… Les ennuis vont commencer… Satalis lui adressa un regard glacial, disant qu’il espérait que elle en avait fini avec cette affaire. Elle lui dit que oui, mais son ton restait froid. Pourquoi ne pouvait-elle pas lui faire confiance ? Pourquoi désapprouvait-il chacun de ses actes ? Elle l’entraîna à l’écart un peu plus tard et exigea de lui des explications. Il tenta de la radoucir par un compliment amusé, mais cela ne la calma pas, au contraire. Oh ! Comme elle haïssait l’homme qui se tenait devant elle ! Ce qu’elle n’aurait pas donné pour pouvoir le frapper, arracher une lueur de douleur dans ses yeux, qu’il comprenne.. !! Mais c’était inutile… Elle savait qu’elle ne pouvait que se résigner. C’est pourquoi… Elle devait changer. Tout… Ils retournèrent finalement en ville une fois la discussion calmée.
Le lendemain, Lyam, Narsuldyne et Amélia la rejoignirent en dehors de la ville. Grahad, inquiet les suivit, demandant à Freyja si elle avait besoin d’aide. Celle-ci lui dit que ce n’était pas la peine, qu’elle s’en sortirait seule. Ne l’écoutant pas, le sombre menaça le groupe qui si quelque chose lui arrivait, c’était devant lui qu’ils en répondraient. Ce ne fût qu’à force de supplications qu’il convint cependant à s’éloigner. Elle leur expliqua alors ce qui s’était passé, mais refusa de leur révéler les noms des agresseurs de Lyam. Amélia la jaugea un instant décida que l’incident était clos, ce qui convînt au jeune humain. Elle ne subirait les pas les foudres de la demi-elfe pour cette fois. Quel soulagement ! Elle se souvenait de la séance de torture qu’elle avait pratiquée sur un humain… Elle doit bien avouer qu’elle n’aurait pas souhaité être à sa place. Amelia savait en effet utiliser son imagination débordante, différents instruments de torture et de puissantes malédictions dans de redoutables combinaisons. Oh, que non, elle n’aurait échangé leur place pour rien au monde !

Le voile du passé

Elle rencontra Ikrel plusieurs fois par la suite. Ce sombre l’intriguait, non seulement par le changement de couleur de ses yeux à des moments spécifiques, ce qui lui faisait penser à sa propre "particularité" mais aussi parce qu’il ne semblait pas être aussi soumis aux Dames que les autres mâles. Intéressant… Elle n’avait plus qu’une envie : jouer avec lui. Perdre ou gagner, peu importe. Elle voulait le connaître davantage.
Ce fût une discussion avec lui et une sombre du nom de Kirlen qu’elle trouva une hypothèse à sa particularité et à celle du médecin. La possession. Il était vrai qu’à certains moments, sa colère se transformait rapidement en désir de…sang. Elle arrivait tout de même à se maîtriser, mais pour cela, il lui fallait faire couler le sien. Il n’y en avait que la vue et le goût qui calmait cette… chose en elle. Pourtant, cela ne prenait pas les proportions que citait Kirlen. Elle n’avait pas l’impression de lutter contre une force invisible émanant d’elle, mais plutôt d’être submergée par ses propres envies, mais à un degrés beaucoup plus élevé, mais sans être pour autant être entièrement spectatrice de ses actes. Elle pouvait en garder le contrôle. Elle ignorait dans quel cas de possession -si elle était possédée- elle se trouvait. Ikrel, quant à lui, restait mystérieux en ce qui le concernait. Elle demeura songeuse… Elle n’avait pas le souvenir d’avoir rencontré de démon… Soudain, les hypothèses de Grahad sur le lien de parenté l’unissant à Heldwige lui revinrent en mémoire, son passé oublié coïncidant avec la naissance d’Heldwige, leur ressemblance troublante et le nom du démon que celle-ci a prononcé à Goddard : Ezekiel. Elle secoua la tête. Non, c’était inutile de se prendre la tête avec ça. Il valait mieux arrêter d’y penser.
Les jeunes femmes prirent finalement congé et se séparèrent.

Cette nuit, Freyja se réveilla en sursaut. Elle avait cru entendre un chuchotement… Un chuchotement qui, pour une raison inconnue lui avait glacé le sang. « Petite guerrière… »

Lorsqu’elle décida d’aller à l’Académie, elle sentit que la tension était à son comble. Lyam et Liran, les armes à la main, interrogeaient une sombre qu’elle n’avait jamais vu auparavant. Une visiteuse inconnue. Lorsqu’elle s’approcha du groupe, elle pu constater son exaspération. Aussi, elle tenta de calmer le jeu en lui présentant ses excuses, en sombre. Après tout, elle ne pouvait pas savoir que les lieux étaient occupés, d’autant plus qu’elle semblait connaître l’endroit. La situation faillit dégénérer à l’arrivée de Narsuldyne. Elle paraissait être sur les nerfs, d’autant plus que le manque de respect de l’inconnue envers elle aggravait la situation. Freyja du lui rappeler la sixième règle du groupe : Céder à la provocation, c’est être faible. En précisant qu’elle ne la considérait pas comme une faible. Cela lui permit de se ressaisir. Aussi, elle partit avec Lyam au fond de la grotte, autorisant la sombre à rester.
Lirandiil et Freyja demeurèrent seuls un moment. Celui-ci lui demanda si elle avait finalement trouvé un but dans sa vie. Ils avaient déjà eu cette discussion quelques jours avant. Amélia avait promis de réaliser le rêve de tous ceux qui l’aideraient dans sa quête. Seulement… En avait-elle un ? Elle lui répondit que non. Il insista, disant qu’elle avait bien un dessein à accomplir. Elle lui offrit la même réponse que tout à l’heure. C’est alors qu’il s’exclama « Et vous ne voulez même pas retrouver le démon qui vous a enfanté ?! ». Ces mots eurent un impact considérable sur elle. Elle resta silencieuse, le visage figé. Heldwige… Ezekiel… Cela suffit à l’humain pour qu’il se rende compte de son erreur. Il lui balbutia d’oublier, mais c’était trop tard. Le mal était fait. Perdant tout contrôle, Freyja lui ordonna de lui dire tout ce qu’il savait, allant jusqu’à le saisir par le col, voyant son refus. Lyam leur cria de se calmer, amusé de les voir agir comme un couple, ignorant ce qui se passait. Lirandiil en profita pour s’éclipser, tandis que la sombre le regardait partir d’un œil mélancolique. Elle lui demandera de lui conter son histoire une autre fois…

Métamorphose

Depuis, elle passait beaucoup de temps avec Heldwige. Elle la considérait vraiment comme sa fille à présent, et non plus qu’une simple protégée. Elle se promenait également à travers le continent, cherchant quelques endroits dignes d’intérêt, et faisait des allers-retours entre le village sombre et Giran. Ce fût là-bas qu’elle fût témoin d’un phénomène particulier.
Alors qu’elle s’apprêtait à quitter la ville, elle vit une lumière blanche entourer une panthère qui semblait s’être pris d’affection pour elle. Lorsque celle-ci s’atténua, l’animal avait disparue, faisant place à une humaine. Freyja se remémora les paroles de Satalis. La majorité des panthères que l’on croise en ville sont en fait des personnes métamorphosées. Elle savait que Grahad et lui-même avaient acquis cette faculté, seulement, aucun d’eux ne lui avait transmis ce savoir. Elle décida alors de suivre la jeune femme afin de l’interroger. Celle-ci trouva la situation amusante, d’être ainsi démasquée. Opinion partagée, pensa Freyja. La jeune femme se présenta sous le nom de Melinia. Lorsque la sombre lui demanda comment elle avait acquis cette capacité, elle lui répondit que cela exigeait un exercice mental énorme. Elle expliqua que, pour métamorphoser le corps, il fallait également transformer son âme. Dans son cas, l’exercice était plus facile que pour les autres, étant donné que son âme était déjà déchirée. Cela ne fit qu’attiser la curiosité de la jeune sombre. La transformation était en effet un phénomène qui l’attirait du plus au point. Elle pensait que, sous forme animale, elle bénéficierait d’une liberté presque totale. Elle était également curieuse de savoir en quel animal elle pourrait se transformer, car il semblerait que ces métamorphoses reflètent l’âme de la personne transformée. Et puis… Ne serait-ce pas une occasion d’être davantage utile ? Voyant son intérêt non-dissimulé, l’humaine lui conseilla de s’adresser à Hardin. Freyja ne put dissimuler sa surprise en entendant ce nom. Elle lui demanda si elle aussi connaissait le sorcier. Melinia acquiessa , disant qu’elle lui a servi de cobaye pour le développement de cette magie. Elle l’enjoigna de suivre la même méthode et de se rendre auprès de lui. Après l’avoir remercié, elle se rendit donc à l’Académie.
Une fois à l’intérieur, elle vit Amelia, Lyam et Narsuldyne discuter au sujet de l’incident avec la sombre de la dernière fois. Amelia approuva l’attitude que Freyja avait adoptée, tandis que celle-ci les salua avant de se rendre auprès du Maître. Elle s’inclina devant lui, lui demandant si il était possible qu’il lui apprenne à se transformer. En entendant le nom de Melinia, celui-ci hocha la tête, acceptant sa requête. Il lui expliqua que le corps et l’âme étant étroitement lié, si l’on veut transformer le corps, l’âme devait également être métamorphosée. Seulement, cela était une opération délicate. Il lui fallait pour cela boire un breuvage spécial à base d’Ectoplasme Stabilisé afin de la rendre apte à la transformation. La potion avait un aspect bizarre qui la fît hésiter un instant. Elle la but finalement, sous l’œil attentif du Maître. La douleur fût atroce. Elle lâcha le gobelet et tomba à genoux. Sa vision se troubla tandis que sa perception du monde se modifia. Les sons, les formes, les odeurs… Ses sens se retrouvaient changés. Il lui fallut un moment pour retrouver son état habituel. « Parfait ! » s’exclama Hardin. Il lui annonça qu’il ne lui restait plus qu’à créer un livre de métamorphose avant de se rendre à la Tour d’Ivoire. Il lui donna les instructions nécessaires pour l’écriture de l’ouvrage. C’est ainsi qu’elle repartit, décidée plus que jamais à devenir l’égale de ses frères et sœurs.
Ca y est… Elle y est finalement parvenue… Elle tenta un nouvel essai. Elle sentit des démangeaisons parcourir tout son corps tandis que sa peau se recouvrait d’une épaisse fourrure blanche et rousse. Son visage s’allongea, tandis que de petites dents acérées jaillirent de ses gencives. La douleur parcourut tout son corps en un instant avant de s’évanouir. Lorsque tout fut terminée, elle se laissa tomber au sol, avant de se relever. Elle contempla un instant ses douces pattes noires avant de s’avancer vers le bord d’une rivière. A la surface de l’eau, une renarde la contemplait d’un air intrigué. Il s’agissait de son reflet. Elle émit un glapissement joyeux et se mit à galoper à travers la plaine. Elle était libre.

Le Passé...

Livre I: Epilogue

"Le vent... si doux, si agréable... Porteur d'apaisement, mais porteur de mort pour d'autres... Celui qui survole ces terres est tout de même étrange aujourd'hui...
-Ah? Le notre est glacé et sauvage. Presque comme toi lorsque tu es furieuse.
-Hé!!"

Freyja ferma les yeux, la sensation de rire de sa soeur lui parvenant. Le Lien entre elles s'était renforcé, elles pouvaient désormais parler normalement, peu importe la distance, sans que quiconque les entende... Elle se remémorait les paroles de leur père. Un jour, il leur avait parlé d'un Lien que les femmes de leur famille partageaient entre elles. Les deux fillettes le regardaient sans comprendre. Ce n'était que maintenant que ses paroles avaient pris toute leur signification.
La jeune sombre sourit un instant et continua son chemin, s'enfonçant plus profondément dans la forêt. Les arbres avaient tous péris pour une raison inconnue. La malédiction des elfes d'après les sombres du village, mais elle ne les appréciait pas.
Ici, les mâles étaient sous la domination des femelles, chacun vivait caché... La liberté qu'elle avait connu et tant aimée avait disparue avec son village... Bien sûr, la prudence était de mise avec les humains, mais quand bien même...
Un autre détail l'avait frappé, creusant davantage le fossé qui la séparait des habitants de cette ville. Ici, la naissance de jumeaux était un mauvais présage, aussi, il était coutume de tuer le dernier né. Cela la choqua profondément, d'autant plus qu'ils lui montrèrent diverses catastrophes ayant frappé des familles sombres qui justement, comportaient des jumeaux en leur sein. Si son visage avait pris une expression étonnée, son coeur n'en saignait pas moins... Des deux soeurs, elle était celle qui était née en dernière.

Elle s'interrompit soudainement. Quelque chose n'allait pas...
Un épais brouillard se leva peu à peu, réduisant son champ de vision à zéro pratiquement. Tout était calme pourtant... Trop calme... Elle n'entendait plus les jappement des keltirs, ni l'habituel bruit sourd des pas des arbres gardiens de la forêt noire... Le vent lui-même s'était tu.
Un frisson lui parcourut l'échine tandis qu'elle dégaina lentement ses deux épées dans une caresse métallique. Un bruissement se faisait entendre... Elle tendit l'oreille, se concentrant avant de se rendre compte qu'il s'agissait d'un chuchotement.
"Petite guerrière..."

La voix était glaçante, amusée et presque... affectueuse. Freyja tenta d'en localiser la source, en vain. Ce fût le silence.
Elle fit quelques pas, lorsque la voix s'éleva à nouveau. Plus proche, et devant elle.
"Oui, viens à moi... Approche."
Elle brandit ses épées, tentant de faire taire les battements de son coeur.
Quelque chose glissa alors rapidement derrière elle. Elle se retourna, prête à riposter, mais il n'y avait rien. Un éclat de rire se fit entendre.
"Quelle nervosité! Aurais-tu peur, petite guerrière?" Le ton était moqueur. Il s'amusait d'elle.
Elle combattit sa rage et afficha un sourire au coin de ses lèvres.
"Et vous, pourquoi vous cachez-vous? Est-ce parce que vous avez honte de votre visage, ou est-ce la peur qui vous pousse?"
Elle fut brutalement projetée contre un arbre. Du sang s'échappa de sa bouche tandis qu'elle retomba au sol, toussant.
Elle tentait de se relever lorsque deux bras passèrent autour de ses bras, la serrant contre un corps. L'homme se pencha doucement pour lui murmurer:
"L'obéissance est de mise avec moi, petite guerrière..."
Elle tourna la tête vers lui, se débattant violemment, si bien qu'elle pu dégager un de ses bras et tenta de porter un coup à la tête de son agresseur. Son geste s'interrompit lorsqu'elle découvrit son visage.
"Non... Ce n'est pas possible..." Sa voix était devenue faible, presque suppliante, car l'homme qui la maintenait n'était autre que le pâle qui l'avait secouru. Ses cheveux, autrefois d'un blond pâle, étaient devenus d'un noir de jais, ses yeux étaient entièrement emplit de cette même couleur... On ne pouvait distinguer ses pupilles. C'était comme si ses yeux étaient couverts d'une mince pellicule d'encre... Un mince sourire s'étirait sur ses lèvres:
"Prépare-toi à faire de beaux rêves, ma douce..."
Il lui plaqua brusquement un chiffon humide contre le visage, tandis qu'elle se débattait à nouveau. Ses forces diminuèrent peu à peu au fur et à mesure que le chloroforme pénétrait à l'intérieur de ses poumons. Ses yeux se fermèrent, puis, plus rien, si ce n'est la vision d'une brume sombre.

Livre II: Torture... La fillette ouvrit les yeux, lentement... Il faisait complètement noir. Le sol, en pierre, était glacé, tout comme les chaînes qui la maintenaient fermement contre le mur. Elle ignorait où elle était. Aucune lumière ne filtrait sous une porte quelconque. Elle ne décelait rien si ce n'est que ces chaînes et... Cette odeur... Une odeur qui agressait ses narines avec une telle intensité qu'elle ne put réprimer un haut-le-coeur. Une odeur qu'elle avait connu autrefois, mais au parfum plus subtil et plus faible. Une odeur de mort. Elle tira violemment sur ses chaînes, mais c'était peine perdue. Ses poignets étaient liés au mur ainsi que ses chevilles. Aucune échappatoire était possible. Elle se laissa finalement retombée contre le mur, attendant. Elle tenta de parler avec sa soeur, mais ses efforts échouèrent également. Elle ramena alors ses genoux sous son menton, semblant regarder droit devant elle, mais son regard était vide. Qu'est-ce-qu'il allait lui arrivé? Qu'est devenu ce pâle qui l'avait sauvé autrefois..? Bien que ses traits étaient identiques à son souvenir, ce n'était pas lui... Cette voix, ce sourire, ces yeux et... Cette malveillance... Freyja se prit la tête entre les mains. A quoi cela rimait-il donc..? Les instants passèrent sans qu'elle n'en eut conscience. Quand soudain, le mur devant elle disparut soudainement, la lumière des torches pénétrant dans sa cellule, dévoilant la silhouette du pâle. Celui-ci claqua des doigts, les rares torches de la salle s'embrasant soudainement. Elle détourna les yeux observant la pièce. Elle ne put réprimer un hoquet d'horreur. Divers instruments étaient posés sur une étagère: des pinces, des crocs, des fioles, des poignards et autres. Ses yeux se fixèrent sur un tas informe tout au fond dans un coin. Elle y distingua des ossements, encore entourés de chairs putréfiés. Des mouches et des rats se précipitaient vers ce festin, transformant ces restes humains, elfiques et autres en une masse infecte et fourmillante. Elle eut une terrible nausée à la vue de ce spectacle. L'homme s'approcha d'elle si près que leurs visages se touchaient presque. Il eut un sourire mauvais aux lèvres: "J'espère pour toi que cet endroit te plait.., chuchota-t-il, car tu vas y passer le reste de tes jours... -Que leur avez-vous fait..?, demanda la jeune sombre, d'une voix faible. -Oh! Rien. Juste des jouets dont je me suis lassé. Mais maintenant, mon nouveau jouet... C'est toi." lui repondit-il dans un fin sourire, lui enlevant ses chaînes. Freyja tenta de se débattre, mais le pâle lui asséna un coup de poing à la tempe. L'enfant percuta le mur, à moitié assommée. "Quel combativité, s'exclama-t-il d'un ton moqueur. Dommage qu'elle ne puisse combler ta faiblesse." Il la saisit par la taille, l'arrachant du sol. Encore une fois, elle se débattit, en vain. Il la posa sur la table. Une ombre vint s'enrouler autour de ses poignets, ses chevilles et sa taille,la maintenant solidement contre la table tandis que le pâle s'affairait à l'étagère d'en face, lui tournant le dos. "Au fait.., lui dit-il en se retournant, un poignard ciselé à la main, enduit d'un étrange liquide, Je ne me suis pas présenté. Je me nomme Ezekiel." Il leva son poignard au-dessus d'elle. Elle le vit fondre sur elle en arc de cercle, un éclair rouge jailli, puis une terrible brulûre. Elle serra les dents, se retenant de hurler. Jamais la douleur n'avait été aussi intense. Le jeu des humains n'était qu'une simple caresse a côté de cela. La douleur se propageait dans tout son corps, parcourant chaque veine, telle une décharge brûlante, qui laisse place ensuite à l'engourdissement. Elle posa ses yeux sur sa blessure. Le sang coulait. Son séquestreur était là, observant le sang, presque hypnotisé. Elle sentait sa blessure avec plus d'acuité au fur et à mesure qu'elle se vidait de son sang, sa vision commençait à se troubler. Elle ne vit que la faible lumière des torches, devenues semblables à des lucioles orangées dans les ténèbres. Ezekiel arracha son regard d'elle, puis sortit de la pièce. Elle était incapable de remuer les lèvres à présent. Oh, elle restait consciente. Son petit coeur continuait de battre alors qu'elle fixait les flammes comme si elles avaient le pouvoir de la sauver. Faibles lueurs dorées d'espoir perçues à travers les ombres... Ezekiel revînt peu après, un pot en terre à la main, ainsi qu'avec une fiole rouge. Il retira les vêtements de l'enfant, dévoilant la plaie, et ouvrit le pot. Il plongea aussitôt ses doigts à l'intérieur avant de les ressortir, les passant sur la blessure. Freyja retint un gémissement. Le moindre contact physique était un véritable supplice. Le pâle continua de caresser la blessure, y répendant le baume. La blessure se referma peu à peu. Une fois la plaie cicatrisée, il referma le pot et déboucha la fiole avant de porter le goulot à la bouche de la petite sombre. "Cinq gorgées si tu veux continuer de vivre", lui dit-il, la mine sérieuse. Sa voix était calme, sans aucune mesquinerie cette fois. Son visage avait une expression grave, impassible et froide. L'enfant obéit, incapable de penser. Une fois les cinq gorgées bues, Ezekiel reboucha la fiole, pencha sa tête au-dessus de l'ancienne blessure et lècha le sang répendu tout autour. Freyja prît peur et tenta de se débattre faiblement malgré le frisson qui la parcourut. L'homme releva la tête vers elle, le menton taché du liquide rouge, un sourire amusé aux lèvres, puis se redressa. "Bien que ça ne soit que des charognards, je dois avouer que les buveurs de sang ont raison sur ce point: ce fluide est absolument délicieux." dit-il, s'essuyant la bouche avec sa manche. L'ombre relacha alors son étreinte, tandis qu'il se saisit de l'enfant, la rattachant à ses chaînes, puis sortît de la pièce, la plongeant de nouveau dans l'obscurité. Freyja était incapable de réfléchir, dans un état à moitié conscient. Eclair d'argent, éclair rouge, décharge alternant la brûlure et l'engourdissement, puis le soin, le repos avant de revoir cette source écarlate jaillir à nouveau. Combien de temps dura ce jeu? Des mois surement, enfin, jusqu'à ce que divers signes montrèrent que la jeune sombre était fécondable. Le démon, car elle avait pu voir sa nature au bout d'un certain temps, entra dans la pièce, conservant toujours son apparence d'elfe pâle. Il ne portait pas de vêtements. Freyja ne comprit pas tout de suite. Ce ne fût que lorsqu'il la souleva pour la plaquer contre le mur, se collant à elle qu'elle devina ce qu'il allait faire. Elle se débattit de toute ses forces, mais c'était en vain, et elle sentît la déchirure caractéristique. Ses yeux étaient baignés de larmes, tandis qu'elle hurlait, cherchant toujours à se dégager. Une fois terminé, il lui murmura: "C'est un cadeau que tu me dois." Le corps de l'enfant glissa alors le long du mur. Petite poupée au visage baigné de larmes, se recroquevillant contre le mur, enfouissant son visage dans ses bras, les genoux ramenés vers elle. Honte... Colère... Haine... Souffrance... Cette scène se reproduit encore et encore chaque jour pendant près d'un mois, Freyja subissant en silence au bout d'un moment. Par fierté ou par abandon? Personne ne le sait. Le démon laissa ensuite l'enfant en paix durant deux autres mois, après desquels il put le voir. La petite fille attendait un enfant.

Livre II: Torture...

La fillette ouvrit les yeux, lentement... Il faisait complètement noir. Le sol, en pierre, était glacé, tout comme les chaînes qui la maintenaient fermement contre le mur. Elle ignorait où elle était. Aucune lumière ne filtrait sous une porte quelconque. Elle ne décelait rien si ce n'est que ces chaînes et... Cette odeur... Une odeur qui agressait ses narines avec une telle intensité qu'elle ne put réprimer un haut-le-coeur. Une odeur qu'elle avait connu autrefois, mais au parfum plus subtil et plus faible. Une odeur de mort.
Elle tira violemment sur ses chaînes, mais c'était peine perdue. Ses poignets étaient liés au mur ainsi que ses chevilles. Aucune échappatoire était possible. Elle se laissa finalement retombée contre le mur, attendant. Elle tenta de parler avec sa soeur, mais ses efforts échouèrent également. Elle ramena alors ses genoux sous son menton, semblant regarder droit devant elle, mais son regard était vide. Qu'est-ce-qu'il allait lui arrivé? Qu'est devenu ce pâle qui l'avait sauvé autrefois..? Bien que ses traits étaient identiques à son souvenir, ce n'était pas lui... Cette voix, ce sourire, ces yeux et... Cette malveillance... Freyja se prit la tête entre les mains. A quoi cela rimait-il donc..?

Les instants passèrent sans qu'elle n'en eut conscience. Quand soudain, le mur devant elle disparut soudainement, la lumière des torches pénétrant dans sa cellule, dévoilant la silhouette du pâle. Celui-ci claqua des doigts, les rares torches de la salle s'embrasant soudainement. Elle détourna les yeux observant la pièce. Elle ne put réprimer un hoquet d'horreur. Divers instruments étaient posés sur une étagère: des pinces, des crocs, des fioles, des poignards et autres. Ses yeux se fixèrent sur un tas informe tout au fond dans un coin. Elle y distingua des ossements, encore entourés de chairs putréfiés. Des mouches et des rats se précipitaient vers ce festin, transformant ces restes humains, elfiques et autres en une masse infecte et fourmillante. Elle eut une terrible nausée à la vue de ce spectacle.

L'homme s'approcha d'elle si près que leurs visages se touchaient presque. Il eut un sourire mauvais aux lèvres:
"J'espère pour toi que cet endroit te plait.., chuchota-t-il, car tu vas y passer le reste de tes jours...
-Que leur avez-vous fait..?, demanda la jeune sombre, d'une voix faible.
-Oh! Rien. Juste des jouets dont je me suis lassé. Mais maintenant, mon nouveau jouet... C'est toi." lui repondit-il dans un fin sourire, lui enlevant ses chaînes.

Freyja tenta de se débattre, mais le pâle lui asséna un coup de poing à la tempe. L'enfant percuta le mur, à moitié assommée.

"Quel combativité, s'exclama-t-il d'un ton moqueur. Dommage qu'elle ne puisse combler ta faiblesse."
Il la saisit par la taille, l'arrachant du sol. Encore une fois, elle se débattit, en vain.
Il la posa sur la table. Une ombre vint s'enrouler autour de ses poignets, ses chevilles et sa taille,la maintenant solidement contre la table tandis que le pâle s'affairait à l'étagère d'en face, lui tournant le dos.
"Au fait.., lui dit-il en se retournant, un poignard ciselé à la main, enduit d'un étrange liquide, Je ne me suis pas présenté. Je me nomme Ezekiel."

Il leva son poignard au-dessus d'elle. Elle le vit fondre sur elle en arc de cercle, un éclair rouge jailli, puis une terrible brulûre. Elle serra les dents, se retenant de hurler. Jamais la douleur n'avait été aussi intense. Le jeu des humains n'était qu'une simple caresse a côté de cela. La douleur se propageait dans tout son corps, parcourant chaque veine, telle une décharge brûlante, qui laisse place ensuite à l'engourdissement. Elle posa ses yeux sur sa blessure. Le sang coulait. Son séquestreur était là, observant le sang, presque hypnotisé. Elle sentait sa blessure avec plus d'acuité au fur et à mesure qu'elle se vidait de son sang, sa vision commençait à se troubler. Elle ne vit que la faible lumière des torches, devenues semblables à des lucioles orangées dans les ténèbres. Ezekiel arracha son regard d'elle, puis sortit de la pièce. Elle était incapable de remuer les lèvres à présent. Oh, elle restait consciente. Son petit coeur continuait de battre alors qu'elle fixait les flammes comme si elles avaient le pouvoir de la sauver. Faibles lueurs dorées d'espoir perçues à travers les ombres...
Ezekiel revînt peu après, un pot en terre à la main, ainsi qu'avec une fiole rouge. Il retira les vêtements de l'enfant, dévoilant la plaie, et ouvrit le pot. Il plongea aussitôt ses doigts à l'intérieur avant de les ressortir, les passant sur la blessure. Freyja retint un gémissement. Le moindre contact physique était un véritable supplice. Le pâle continua de caresser la blessure, y répendant le baume. La blessure se referma peu à peu. Une fois la plaie cicatrisée, il referma le pot et déboucha la fiole avant de porter le goulot à la bouche de la petite sombre.

"Cinq gorgées si tu veux continuer de vivre", lui dit-il, la mine sérieuse.

Sa voix était calme, sans aucune mesquinerie cette fois. Son visage avait une expression grave, impassible et froide. L'enfant obéit, incapable de penser. Une fois les cinq gorgées bues, Ezekiel reboucha la fiole, pencha sa tête au-dessus de l'ancienne blessure et lècha le sang répendu tout autour. Freyja prît peur et tenta de se débattre faiblement malgré le frisson qui la parcourut. L'homme releva la tête vers elle, le menton taché du liquide rouge, un sourire amusé aux lèvres, puis se redressa.

"Bien que ça ne soit que des charognards, je dois avouer que les buveurs de sang ont raison sur ce point: ce fluide est absolument délicieux." dit-il, s'essuyant la bouche avec sa manche.

L'ombre relacha alors son étreinte, tandis qu'il se saisit de l'enfant, la rattachant à ses chaînes, puis sortît de la pièce, la plongeant de nouveau dans l'obscurité. Freyja était incapable de réfléchir, dans un état à moitié conscient.

Eclair d'argent, éclair rouge, décharge alternant la brûlure et l'engourdissement, puis le soin, le repos avant de revoir cette source écarlate jaillir à nouveau. Combien de temps dura ce jeu? Des mois surement, enfin, jusqu'à ce que divers signes montrèrent que la jeune sombre était fécondable. Le démon, car elle avait pu voir sa nature au bout d'un certain temps, entra dans la pièce, conservant toujours son apparence d'elfe pâle. Il ne portait pas de vêtements. Freyja ne comprit pas tout de suite. Ce ne fût que lorsqu'il la souleva pour la plaquer contre le mur, se collant à elle qu'elle devina ce qu'il allait faire. Elle se débattit de toute ses forces, mais c'était en vain, et elle sentît la déchirure caractéristique. Ses yeux étaient baignés de larmes, tandis qu'elle hurlait, cherchant toujours à se dégager. Une fois terminé, il lui murmura:

"C'est un cadeau que tu me dois."

Le corps de l'enfant glissa alors le long du mur. Petite poupée au visage baigné de larmes, se recroquevillant contre le mur, enfouissant son visage dans ses bras, les genoux ramenés vers elle. Honte... Colère... Haine... Souffrance...
Cette scène se reproduit encore et encore chaque jour pendant près d'un mois, Freyja subissant en silence au bout d'un moment. Par fierté ou par abandon? Personne ne le sait.
Le démon laissa ensuite l'enfant en paix durant deux autres mois, après desquels il put le voir. La petite fille attendait un enfant.

Livre III: Temps paisibles ou illusions?

A partir de ce moment, il arracha l'enfant à sa sombre cellule et l'amena dans sa chambre. Freyja tremblait, le froid et la peur engourdissant son corps. Ils se trouvaient dans une grotte éclairée par de nombreuses torches. Les murs étaient nus hormis ceci. Le pâle la portait dans ses bras et se dirigea vers un pan de la paroi. Il posa sa main dessus, semblant se concentrer un instant. La paroi disparut, révélant l'entrée d'une pièce spacieuse et richement meublée. Le cadre de vie était confortable à la vue du lit à baldaquin, du canapé et des quelques coussins éparpillés ici et là. Il y avait une armoire, une commode, un miroir et autres meubles. L'homme déposa la petite fille sur le canapé et se dirigea vers la commode, y sortant une petite robe à la taille de la fillette. Il entreprit de l'habiller, Freyja trop surprise pour réagir.

Durant les mois de sa gestation, il lui fit visiter la grotte. Ainsi, elle découvrit que la grotte qui semblait tout à fait banale, possédait de nombreuses pièces secrètes, dont des cellules, dont une qui renfermait un vampire, affamé depuis longtemps. Ezekiel lui apprit que le baume qu'il utilisait pour la soigner contenait la salive de celui-ci. La créature le regarda avec une haine non-dissimulée, tirant sur ses chaines au point que celles-ci s'enfonçaient dans sa chair saillante.
Les pièces les plus importantes comme le garde-manger, la réserve de potions, le soi-disant laboratoire et l'ancienne cellule de Freyja étaient gardées par des monstres.
Un jour, le démon l'autorisa à observer les diverses fioles dans la réserve. Elles portaient toutes une étiquette, mais écrite dans une langue inconnue. Ezekiel éclata de rire alors qu'elle essaya de déchiffrer l'écriture, disant qu'il s'agissait de sa langue natale et donc que c'était peine perdue si elle souhaitait les traduire.
Elle ne pouvait se déplacer seule durant ces nombreux mois. Lorsqu'il s'absentait, ce n'était jamais pour très longtemps. Il apparaissait soudainement derrière elle quelques fois, tandis qu'elle restait le plus souvent enfermée dans la chambre d'Ezekiel, dormant dans le canapé, serrant un coussin contre elle, les jambes repliées. Parfois il l'observait en train de dormir, assis sur le bord de son lit. Jamais elle ne partageait son lit, elle demeurait toujours dans le canapé. S'attachant un peu à son ravisseur.

Pourquoi un tel changement de comportement? Oh, c'est simple. Le démon avait de nombreuses personnes à faire venir... Ses semblables, ses frères et soeurs. L'enfant qui naîtra sera l'hôte de l'un d'eux et il en sera de même pour tous les autres. Mais pourquoi attendre aussi longtemps alors que capturer un autre hôte, le contraindre au rituel serait beaucoup plus simple et rapide? Tout simplement parce que si les autres clans de démons s'apercevaient que les siens avaient trouvés un moyen de passer la barrière, il y aurait certainement une tuerie.
Son peuple avait énormément souffert de la dernière bataille, et était à présent très affaibli. Il ne survivrait pas à une nouvelle attaque, il fallait donc trouver refuge dans cet autre monde et procéder à une évacuation. Ici, ils auraient le pouvoir. Ce monde sera leur, mais pour cela, il lui fallait à présent la confiance et l'attachement de la jeune sombre. Qu'elle se plie à sa volonté sans protestation. Elle était à la fois faible et forte, fière et magnifique. Elle a résisté à la torture, sans versé de larmes comme il s'y attendait. Son corps sera, une fois adulte, offert à la Reine, il savait qu'elle lui plairait. Quant à son enfant, il deviendra l'hôte de la jeune princesse.

Livre IV: L'attaque

Les mois passèrent, lorsque Freyja sentit la douleur irradier soudainement son ventre devenu rond. La naissance de l'enfant approchait. Le démon la ramena dans l'ancienne cellule et la déposa sur la table.
Tout était déjà prêt pour le rituel qui suivrait aussitôt. Les contractions redoublèrent d'intensité, cherchant à expulser le nouveau-né, mais quelque chose n'allait pas... Le bassin de la jeune sombre était trop étroit encore pour permettre au bébé de sortir. L'ombre d'Ezekiel se matérialisa en une créature à l'aspect humanoïde, allant chercher divers instruments ainsi que le fameux baume et la fiole rouge.
Il lui fallait être prudent... Il ne pouvait se permettre de perdre la mère ou l'enfant. Il entreprit de créer une ouverture à l'aide d'un fin poignard, pour permettre au nouveau-né de sortir du corps de Freyja.
La jeune sombre saignait abondamment alors que le démon put prendre le bébé dans ses mains. Une femelle, sans aucune anomalie. Il ne lui restait plus qu'à soigner la mère, puis de procéder au rituel. <
Il entama donc les soins, mais quelque chose vînt le perturber... Une présence étrangère... Et même plusieurs... Ils étaient nombreux... Il n'eut que le temps de soigner l'entaille partiellement, puis sortit de la cellule, sans prendre la peine de masquer l'entrée.

Le démon fût surpris de trouver à l'entrée de son refuge l'elfe Dorian et son armée. Il n'en montre toutefois aucun signe, se contentant de sourire. Dorian était un proche ami de son hôte actuel, surement pour cette raison, l'a-t-il recherché au point de se retrouver à présent en terres sombres.
Le combat débuta après quelques échanges de paroles. Ezekiel dévoila sa vraie forme, voyant le nombre de combattants qu'il aura à affronté. Ce fût un vrai massacre... Les murs de la grottes furent éclaboussés du sang des elfes, le démon dévoilant une puissance qui à priori, les surpassait de loin. Ce ne fût que par le sacrifice du lieutenant Autrev qui permit d'abimer le corps du démon, que Dorian, par la ruse, la force et le soutient de ses frères, terrassa le démon, qui reprit l'aspect de son hôte peu avant le coup fatal. Son enveloppe corporelle gisant sur le sol, blessé, le démon disparut, réapparaissant dans la cellule.
Le bébé pleurait, Freyja devenue très faible, mais encore consciente. Le démon n'hésita pas un instant. Il fondit sur le corps de la jeune sombre, entrant en elle, laissant sur son sein gauche, une marque s'y méprenant à un tatouage en forme de dague en croissant de lune, constituée de lignes complexes, marque de sa présence dans le corps de son hôte. Il devait se reposer...

Freyja sentit son âme se déchirer en deux. Elle ignorait ce qui lui arrivait, mais la sensation était telle qu'elle perdit conscience. Elle ne put voir l'elfe Dorian qui les découvrit avec stupeur, elle et sa fille. Elle n'eut pas conscience d'être soignée et que, pour ne pas être choquée à la vue de la cicatrice, celui-ci grava de fins tracés avec sa dague, donnant ainsi à la blessure la forme d'une arabesque partant de son intimité. Les elfes incantèrent ensuite des sorts de soin tandis que d'autres exploraient la grotte, mais ne trouvèrent rien, mis à part la cellule de l'enfant. Les autres enterraient leurs frères morts auprès des arbres. Dorian prit ensuite la mère et le nouveau né dans ses bras pour les ramener vers les montures. C'est alors que quelque chose attira son attention, derrière un arbre, non loin de la grotte. Une chevelure rousse, et un être de petite taille.

Livre V: Lirandiil

"Qui va là?", appela-t-il, ses soldats aussitôt prêts à dégainer.
La silhouette se réfugia aussitôt derrière l'arbre. Des soldats s'approchèrent, saisirent l'individu par le bras et le firent sortir de sa cachette. Il s'agissait d'un petit garçon, un jeune humain. Ses joues avaient pris une teinte écarlate, géné d'être découvert. Il restait toutefois dans son regard une lueur d'horreur, signifiant qu'il avait deviné ou vu la scène. Il balbutit quelques mots, s'excusant timidement. Dorian eut un regard dur. Décidemment, ces humains ne sont guère attentifs avec leur progéniture...

"Où habites-tu petit, demanda l'elfe.
-Heu... P-près de Gludin.., répondit le jeune garçon, rougissant davantage, baissant le regard, M-mais mon père est à Gludio... Normalement..."

Le pâle soupira et lui demanda le nom de son père afin de lui envoyer un elpy pour le prévenir que son fils a été retrouvé. Il déposa Freyja dans le chariot qui avait servi à transporter les armes et armures des soldats, qui était à présent inutile, et confia le bébé, enveloppé dans une couverture à un soldat le temps d'écrire le message. Pendant ce temps-là, le petit garçon grimpa dans le chariot, assit près de la sombre, l'observant avec hésitation. Il tendit alors timidement une main vers elle comme pour voir si elle était réelle lorsqu'elle ouvrit brusquement les yeux, posant son regard sur l'humain. Celui-ci rougit brusquement, s'écartant tout aussitôt:

"Dé-désolé, j-je ne voulais pas..!!, bégaya-t-il, agitant ses bras devant lui."

Comme elle le fixait de ses yeux d'un noir tendre, il s'empourpra davantage, se grattant la tête, l'air gêné.

"Va-t'en.., dit-elle d'une voix sans intonation."

L'enfant baissa les yeux tandis que la jeune sombre se détourna, ramenant ses genoux vers elle, les enlaçant, le regard vide.

"J-je... Je m'appelle Lirandiil.., dit-il, cherchant à engager la conversation, un sourire gêné aux lèvres, mais on m'appelle Liran.
-Je m'en fous.."

Ces mots semblèrent avoir un impact important sur lui, car il redescendit du chariot, parler de la réaction de Freyja à Dorian. Celui-ci lui explica que la jeune sombre avait été capturée par le démon qui vivait dans la grotte et que celui-ci l'aurait enfanté. L'humain dégluttit et posa son regard sur la sombre.

Freyja regardait son médaillon et l'ouvrit, posant son regard sur l'image de ses parents et de sa soeur. Le seul souvenir de son passé qu'elle chérissait... Une larme coula le long de sa joue, se rappelant la mort de leur père. Elle serra le médaillon dans son poing, l'onyx luisant sous la clarté de la Lune, tandis qu'elle fermait les yeux. Elle ne remarqua pas Lirandiil qui vînt s'assoir près d'elle, restant silencieux, n'osant pas la regarder.
Le départ fût finalement donné et le chariot se mit à avancer, secouant les deux enfants. Le bébé demeurait dans les bras de Dorian.
Freyja regarda la cascade, derrière laquelle se trouvait la grotte, s'éloigner avec un mélange de soulagement et de tristesse. C'est alors qu'elle s'allongea, les genoux toujours repliés vers elle, et ferma les yeux, sombrant dans le sommeil.

Ils voyagèrent ensemble durant plusieurs jours, Freyja acceptant peu à peu la présence de Liran près d'elle si bien qu'un jour, ce fut son tour d'éprouver de la curiosité pour le jeune garçon. Un matin, alors qu'elle était réveillée avant lui, elle se pencha au-dessus du garçon, l'observant, le regard interrogateur, son visage à une trentaine de centimètres du sien. C'est alors qu'il ouvrit les yeux, s'étouffant à moitié à la voir ainsi, rougissant d'un coup. Freyja éclata de rire pour la première fois depuis longtemps. Liran eut un léger sourire timide.
Sur toute la durée du trajet, elle s'amusa à le faire rougir ou jouer avec lui, tout simplement, fermant les yeux peu à peu sur les sombres mois passés.
Ils arrivèrent près du village sombre plusieurs jours plus tard. Ils restèrent à bonne distance tout de même afin d'éviter tout conflit entre les pâles et les gardes sombres. Dorian prit Freyja dans ses bras pour la déposer sur le sol avant de commencer l'incantation d'un sort. Durant ce temps, les deux enfants se regardaient silencieusement, l'air un peu triste. Le temps des adieux était venu, ils le savaient..:

"Freyja..", murmura la jeune sombre, souriant légèrement, révélant ainsi son nom avant de sombrer dans le sommeil, touchée par le maléfice de Dorian.

C'est ainsi que Freyja oublia Ezekiel, oublia les tortures, sa fille, Dorian et celui qui apporta une lueur d'espoir alors qu'elle était plongée dans les ténèbres et qui deviendra par la suite celui qu'elle aimera comme jamais: Lirandiil.